Algérie. Divisions sur la criminalisation du colonialisme français

 Algérie. Divisions sur la criminalisation du colonialisme français

En 1962


A la veille du 50ème anniversaire de l’indépendance du pays, les divisions au sein du pouvoir algérien sur la nécessité ou non de promulguer une loi criminalisant le colonialisme français se révèlent au grand jour. (Photo AFP)




 


Très puissante organisation de masse, l’ONM (Organisation nationale des Moudjahiddines) a ressorti, à l’occasion du congrès de son organisation, la hache de guerre contre la France coloniale enterrée depuis 2010 par le gouvernement algérien.


Hier dimanche, cette association des anciens combattants a réitéré son attachement à la revendication d’un projet de loi criminalisant le colonialisme et appelé la France à présenter des « excuses pour les crimes qu’elle a commis à l’encontre du peuple algérien ». Son secrétaire général, Said Abadou, aémis, le même jour,  le souhait « de voir le prochain parlement accorder un grand intérêt à ce projet de loi et l’adopter». 


Prudent, M. Abadou a tenu à préciser que la loi criminalisant le colonialisme français « ne constitue pas une atteinte à l’État français, mais une réaction à la loi glorifiant le colonialisme, adoptée par le parlement français en 2005 ». 


 


Un autre discours plus mesuré


Dimanche toujours, les Algériens ont droit à un tout autre son de cloche de la part du ministre des Moudjahiddines qui, sur les ondes de la radio algérienne,  s’est dit  « peu enthousiaste » quant à l’adoption d’un projet de loi criminalisant le colonialisme français.


Selon lui, tenir vaille que vaille à adopter une telle loi en réplique à celle glorifiant le colonialisme français adoptée par le parlement français en 2005, est de nature à distraire les Algériens « de questions plus profondes et plus importantes susceptibles de servir l’intérêt de la nation ».


Les efforts du pays doivent être, de son point de vue, concentrés sur la récupération des archives nationales de la révolution algérienne détenues par plusieurs pays tels la Turquie, la Grande Bretagne, la France et l’Egypte.


Comme pour s’épargner l’accusation de pro Français, M. Abbes a soutenu que même si le projet de loi criminalisant le colonialisme n’est pas adopté, la mémoire algérienne n’oubliera jamais « l’atrocité du colonialisme français qui a spolié les richesses de l’Algérie et brisé les plus grands de ses symboles ».


En 2007 pourtant, à la veille de la visite de Sarkozy en Algérie, ce même Mohamed Cherif Abbes avait tenu des déclarations incendiaires contre la  France et le président français qui ont failli faire capoter le séjour algérois de ce dernier. Qu’est-ce qui a changé depuis ? Rien.


Aurait-il été instruit par certaines parties de tenir ce discours mesuré pour faire contre poids à la salve de Said Abadou qui appartient à la famille révolutionnaire et au même parti, le RND (Rassemblement national démocratique) ? Ce n’est pas exclu.


Fait significatif : le président Bouteflika a boudé le congrès de l’ONM, se contentant d’envoyer un message où il a réitéré son appel aux Algériens à aller voter le 10 mai prochain.


Au vrai, ces divisions sur la loi criminalisant le colonialisme ne sont que l’expression des dissensions entre les différents clans qui se livrent une guerre sans merci pour le pouvoir. L’après 10 mai et surtout l’été 2012 s’annoncent chauds. Très chauds même.


Yacine Ouchikh




 

Yacine Ouchikh