Boycott d’Israël : « Si tout le monde fait ces petites choses, ça peut faire une différence »

 Boycott d’Israël : « Si tout le monde fait ces petites choses, ça peut faire une différence »

Olivia Zemor


 


BDS, Boycott Désinvestissement Sanction. Trois lettres synonymes d'une façon de lutter non-violente qui s'impose peu à peu. Si les débuts étaient plutôt modestes et confidentiels, aujourd'hui, la campagne de boycott attire l'attention du gouvernement israélien.


 


Olivia Zemor, présidente de l'association Europalestine qui soutient et travaille pour le boycott, revient avec nous sur cette forme de lutte qui pourrait faire une différence.


 


LCDL : Les bombardements de l'été dernier ont permis de jeter un coup de projecteur sur la Palestine. Regrettez-vous que ce soit moins le cas un an plus tard ?


Olivia Zemor : Les bombardements de l'été dernier n'étaient pas les premiers. L’opération Plomb durci (Bombardements de 2009) a bien secoué les gens. Et ça a été, véritablement, le point de démarrage des campagnes de boycott.


Les médias tiennent un silence mafieux sur ce qu'il se passe, parce que c'est de cela que je parle, je parle bien d'omerta. La plupart des journalistes s'autocensurent sur la plupart des sujets qui fâchent parce qu'il ne faut pas contrarier le lobby israélien pour ne pas perdre son job. Et ce dernier a suffisamment fait d'exemples pour que les autres soient refroidis. Mais les gens ne sont pas stupides et ont bien compris, qui est occupé et qui est occupant. Et beaucoup ont un grand sentiment d'impuissance.


 


Le grand public peut-il vraiment changer les choses avec le boycott ?


Avec les bombardements de l'été dernier, nous voyons pas mal de gens, notamment les 20-35 ans, continuer à faire des choses. Nous ne leur demandons pas d'être sur le terrain 24h sur 24. Chacun peut faire un petit peu : une vignette sur leur carte vitale montrant qu'ils ne veulent pas de médicaments génériques de la marque israélienne Teva … On ne va quand même pas se soigner avec les médicaments d'un pays qui empêche les Palestiniens de se soigner, qui tire sur les dépôts de médicaments… C'est un exemple simple de quelque chose que l'on peut faire.


Quand les gens font leurs courses, on leur apprend à ne pas regarder que les prix et les promotions, mais à regarder la provenance des produits. Nous leur apprenons aussi que les commerçants sont obligés légalement d'inscrire la provenance des produits frais et secs en caractères aussi gros que le prix. Sinon ils sont en infraction et chacun peut intervenir, prendre une photo et prévenir la répression des fraudes.


 


Ces actions sont-elles suffisantes ?


Si tout le monde fait ces petites choses quotidiennes ça peut faire une différence. Nous avons vu des supermarchés arrêter de se fournir en avocats, en pamplemousse ou autre, d’origine israélienne, parce qu'ils avaient tellement de problèmes, notamment avec l'opération Petit Poucet (placer des produits israéliens dans un endroit où ils n'ont rien à faire dans le magasin). Quand ça devient massif, beaucoup de commerçants ont compris le manège et en ont marre de payer des heures supplémentaires juste pour replacer les produits au bon endroit, surtout quand ce sont des produits frais …


 


Où en est la France par rapport au boycott ?


Certains pays sont beaucoup plus avancés en termes de boycott que la France, parce qu'il y a moins la pression des lobbys israéliens. Par exemple en Angleterre, de nombreuses personnalités très connues, dans les domaines artistiques, scientifiques… affichent le fait qu'ils boycottent Israël et qu'ils n'iront plus s'y produire tant que le pays occupera les Palestiniens. Comme pour l'Afrique du Sud de l'Apartheid où ça avait marché. Aujourd'hui, contrairement à quelques années auparavant, ils [Israël, ndlr] en sont à pleurer que le boycott est une menace existentielle, ils mettent en place des think tanks et font de la contre-propagande.


 


Le boycott peut-il impacter les grandes entreprises françaises qui travaillent toujours avec Israël ?


Certaines firmes qui se sont impliquées dans la collaboration avec Israël, ont aujourd'hui reculé. Quand vous voyez Véolia, qui s'était chargée de l'exploitation d'un tramway de Jérusalem-Ouest aux colonies, un tramway clairement réservé aux colons, avec la campagne de Boycott, l'entreprise a commencé à perdre de très gros contrats au niveau international. Véolia a finalement abandonné et vendu ses parts pour la construction de ce tramway. Orange aussi récemment, a annoncé la fin de contrat avec l'entreprise israélienne Partner. Les choses avancent. En Afrique du Sud, ça a pris plus de vingt ans.


 


Propos recueillis par F. Duhamel


 

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