Malgré le confinement, les psychothérapeutes consultent toujours

 Malgré le confinement, les psychothérapeutes consultent toujours


Imane Adimi est psychologue clinicienne et psychothérapeute, essentiellement en Seine-Saint-Denis. Comme beaucoup de ses collègues, elle a décidé de continuer à travailler. A distance…


Vous continuez à suivre certains patients. Comment vous vous adaptez face à cette situation inédite ? 


Oui. Ce n’est pas juste certains patients que je continue à suivre mais la grande majorité. Le suivi se fait à distance. Soit par téléphone, soit par Skype. Le cadre thérapeutique s’adapte aux circonstances, il suffit de trouver les bonnes conditions, adaptées à chaque patient : par exemple, des rendez-vous peuvent être donnés tôt le matin pendant que les enfants / le conjoint dorment. Certaines personnes refusent le suivi à distance parce qu’elles n’arrivent pas à trouver assez d’intimité dans leur appartement. 


Comment le suivi se passe avec les enfants ? 


Comme ils sont censés suivre l’école à distance, j’ai mis en place plus de séances avec eux. Par exemple, avec les ados qui passent le brevet, ou le bac, je les accompagne par téléphone mais aussi en faisant un « point mail » où ils me font part de leurs objectifs de la semaine. Ils me disent comment ils se sentent, comment ils s’organisent etc. Ca ressemble un peu à du « coaching/suivi personnalisé ».


Est-ce que le confinement accentue ou diminue le mal-être chez les personnes souffrant de dépression ? 


Il y a différents types de dépression et ça me semble compliqué de faire une généralité. Par contre, des dépressions peuvent naître suite au confinement. Des sujets non dépressifs peuvent développer alors des accès d’angoisse dû au confinement (et à cette injonction à rester chez soi) et d’autres peuvent appréhender au contraire le déconfinement. Celui-ci peut créer de grandes angoisses face à cet inconnu. 


Que faire si on sent vraiment sa santé mentale dépérir?                             


Les urgences psychiatriques restent ouvertes. Surtout ne pas s’isoler davantage. Il y a différentes plateformes d’écoutes qui sont mises en place (ex: psychologues-solidaires.fr qui est présente bénévolement pour les soignants et personnel paramédical) ainsi que des associations présentes sur le terrain. Les cabinets sont fermés mais les psychologues sont toujours là. Il ne faut pas hésiter à les contacter si on en ressent le besoin. Par ailleurs, il est légitime de ressentir des « coups de mou », de se sentir triste. C’est une situation inédite, nous sommes confinés dans une réalité géographique mais notre vie psychique elle ne l’est pas, nos ressources internes sont illimitées. Ces temps peuvent aussi permettre d’aller chercher des ressources inexploitées en nous (on voit, par exemple, l’essor et la créativité des vidéos humoristiques durant ce confinement, comment certains soignants ont fait preuve d’inventivité face aux manques de matériels etc.)


Et que préconisez-vous pour aller mieux ? 


Le sport peut faire beaucoup de bien (sur internet il y a d’excellents tutos adaptés à tout âge et tout niveau). On constate aussi un essor de moments de partage en famille : prendre du temps pour cuisiner tous ensemble, ensemble pour créer, jardiner, dessiner, danser etc. Tous les instants de bienveillance et de partage sont à saisir mais aussi à créer. Quand on est confiné à plusieurs, les moments pour soi sont aussi très importants. Ecrire peut permettre de se libérer de certains ressentis et tenir un journal de bord peut être un bon outil.

Nadir Dendoune