Loubna Bensalah, marche à pied…d’égalité

 Loubna Bensalah, marche à pied…d’égalité

crédit photo :Photo prise par le photographe Aziz Laatiri


La Marocaine a initié en juillet 2016 le projet “I walk with her” (“Je marche avec elle”). Son but : aller à la rencontre des femmes et en apprendre davantage sur elles. Cette expérience l’a menée à parcourir 1 000 kilomètres au Maroc et 500 en Tunisie


“Un matin, je me suis réveillée en me disant qu’il manquait quelque chose à ma vie”, ­résume Loubna Bensalah. Du haut de ses 26 ans, la Marocaine résidant à Rabat n’a pas froid aux yeux. “Pour être honnête, au départ, je me suis juste dit que j’allais marcher. Je ne savais pas combien de kilomètres. Une seule chose était sûre, je voulais rencontrer les femmes marocaines”, explique-t-elle. Sa première marche, longue de trois mois, l’a ainsi menée de Casablanca à la Plage blanche, dans le sud du pays.


Loubna enchaîne les anecdotes à un rythme soutenu. Ses éclats de rire sont des invitations au partage, son phrasé est sans pareil et son récit, dans un français parfait mâtiné de darija (arabe dialectal marocain). L’ancienne professeure de communication raconte et se raconte. “Avec ‘I walk with her’, je fais référence à toutes ces femmes que j’ai croisées sur ma route. Je parle également de celles qui ont partagé un bout de chemin avec moi, que ce soit Hind au Maroc ou Belkiss en Tunisie”, témoigne Loubna, qui ajoute : “Le rapport aux hommes, au voile, à la nudité, au féminisme : chaque femme est tellement ­différente face à ces problématiques. J’ai rencontré au sein d’une même ­famille une ­doctorante résolument indépendante ne souhaitant pas se ­marier et une conservatrice heureuse d’avoir pour seule ambition de trouver chaussure à son pied. Alors, lorsque j’entends parler de ‘la’ femme marocaine, je trouve ça aberrant !”


 


Une nouvelle forme de tolérance


Ces rencontres l’ont aussi poussée à sortir de sa zone de confort. Originaire de Berkane, Loubna explique être chanceuse. “J’ai l’opportunité de mener ce type de projet, car j’ai peu ressenti la pression sociale ou patriarcale que nombre de femmes subissent. D’ailleurs, j’ai appris une nouvelle forme de tolérance. Certains modes de vie ne me correspondent pas, mais qui suis-je pour juger ? Ces rencontres m’ont bouleversée et ont fait tomber pas mal d’idées préconçues.”


Le 1er avril, Loubna a inauguré le projet “Kayna” (“Je suis présente”, ndlr), une marche 100 % féminine de 14 kilomètres pour échanger sur la place des femmes dans l’espace public. La première édition, qui a eu lieu à Safi, ville portuaire située sur la côte atlantique marocaine, a réuni 15 participantes.


Les initiatives qu’elle lance ne passent pas inaperçues. Aussi son projet “I walk with her” lui a-t-il permis de décrocher le prix du développement personnel lors de l’édition 2017 du concours Ten Outstanding Young Persons, organisé par la Jeune chambre internationale du Maroc. L’Unesco l’a également invitée à prendre part au plan d’action du secrétaire général de l’ONU pour la prévention de l’extrémisme violent. C’est dans ce cadre qu’elle s’est exprimée, le 24 avril, sur la place des femmes au Maroc et sur ses diverses ­expériences. La suite ? Loubna prévoit déjà de repartir. “J’ai enfin trouvé ma vocation, c’est de rencontrer l’autre. Découvrir, transmettre et rapporter ce que j’ai vécu. Je vais donc continuer mon voyage…” Que l’on suivra de loin en loin. 

Khadija Mahrouk