Strasbourg va attaquer l’État pour sa « défaillance » à héberger les sans-abris

 Strasbourg va attaquer l’État pour sa « défaillance » à héberger les sans-abris

Le campement, qui a compté jusqu’à 200 sans-abris, s’était installé près de la mairie dans le centre de Strasbourg. ABDESSLAM MIRDASS / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP

La mairie de Strasbourg, où un campement de migrants est sur le point d’être évacué, va attaquer l’État en justice pour sa « défaillance » à mettre à l’abri les personnes à la rue. La maire écologiste, Jeanne Barseghian, lance également un appel national aux « élus » et « associations » qui le souhaitent à rallier son action.

« Malgré une action volontariste de la Ville de Strasbourg, la création de 500 places d’hébergement, l’ouverture d’un gymnase, nos moyens (municipaux) ne suffisent pas à répondre à cette grande détresse et à cette crise humanitaire. La mise à l’abri relève de l’État. Il y a carence. Donc, j’ai décidé que la ville de Strasbourg intenterait une action en responsabilité contre l’État, du fait de cette défaillance », a déclaré l’élue EELV lors d’une conférence de presse. Mme Barseghian n’a pas donné de date quant à la saisine de la juridiction. Mais, elle a assuré qu’elle aurait lieu « le plus vite possible ».

« On arrive véritablement au bout d’un modèle. La France connaît une crise humanitaire sans précédent avec, dans toutes les grandes villes françaises, des centaines de personnes (…), des enfants, qui sont à la rue dans le froid, sans droits, sans accès aux soins, dans la misère », a poursuivi l’élue écologiste, déplorant que l’État n’agisse pas « dans les responsabilités » et « les compétences qui sont les siennes ».

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L’édile invite « tous les élus » et « toutes les associations » de France qui le désirent à « rejoindre cette action en responsabilité contre l’État ».

 

La « promesse » de Macron

« Je vous rappelle quand même que l’une des premières promesses d’Emmanuel Macron en 2017, c’était qu’à la fin (de cette même année), il n’y aurait plus personne à la rue. Autant vous dire que cinq ans et demi plus tard, évidemment, cette promesse n’est absolument pas tenue », a encore déclaré Mme Barseghian.

La maire de la capitale alsacienne s’exprimait lundi, alors qu’un campement de migrants était sur le point d’être évacué par la police, après la décision du tribunal administratif de Strasbourg. Ce dernier avait demandé vendredi à la ville de le démanteler, suite à une saisine par la préfecture du Bas-Rhin.

« Compte tenu du fait que la carence de la maire de Strasbourg porte une atteinte grave à la dignité humaine, le juge des référés lui enjoint de faire évacuer le campement dans le délai de trois jours », a tancé le tribunal.

 

Bras de fer entre la mairie et la préfecture

Situé depuis fin mai, place de l’Étoile, en lisière de l’hypercentre et à quelques dizaines de mètres de la mairie, il a compté jusqu’à 200 personnes. La plupart d’entre eux sont originaires de Géorgie, Albanie et Macédoine, parmi lesquels des enfants. Selon Floriane Varieras, adjointe chargée de la ville inclusive, il restait lundi matin environ une cinquantaine de personnes sur le campement.

Certaines des familles campant sur place doivent cohabiter avec des rats, alors que les températures sont de plus en plus basses. La mairie, qui dit être au bout de ce qu’elle peut faire en matière d’hébergement, avait ouvert mi-septembre un gymnase pour mettre à l’abri certains migrants.

Ce campement avait été au centre de plusieurs passes d’armes ces derniers mois entre Mme Barseghian et la préfète, Josiane Chevalier. Cette dernière faisait valoir que c’était à la mairie, propriétaire du terrain, de demander l’évacuation du camp irrégulier à la justice. Ce que Mme Barseghian s’était toujours refusée à faire. Elle reprochait en revanche à l’État de ne pas assumer ses responsabilités en matière d’accueil.

« On a beaucoup médiatisé la question (de ce) campement » parce qu’il « est plus visible que les autres » et qu’il « se trouve devant la mairie », a encore relevé Mme Barseghian. Celle-ci a rappelé que le jugement de vendredi ne statuait pas sur la mise à l’abri des personnes qui y vivent et que son évacuation ne règlera donc « pas le problème » des sans-abris à Strasbourg.

Rached Cherif