Et si les femmes avaient le droit de vieillir comme les hommes ?

 Et si les femmes avaient le droit de vieillir comme les hommes ?

K. Magnusson / Cultura Creative / Cultura Creative via AFP

Les hommes ne devraient pas s’interdire de lire les ouvrages qui semblent défendre les intérêts des femmes en priorité, pour une raison très simple : rien de mieux qu’un autre regard pour dessiller les yeux et les ouvrir sur des réalités que l’on ne soupçonne même pas.

C’est bien le cas de l’enquête publiée par Amanda Castillo qui s’est attachée à observer des couples célèbres où l’homme glorifie la jeunesse de sa compagne et à analyser les schémas véhiculés par les produits culturels : publicité, cinéma, littérature, photographie… pour dénoncer au final le discours d’hommes obnubilés par les corps juvéniles.

La femme a-t-elle le droit de vieillir ? Apparemment non, et c’est ce que tente de dénoncer l’ouvrage Et si les femmes avaient le droit de vieillir comme les hommes ? qui s’insurge contre le diktat d’une « péremption » féminine qui commence dès 40 ans. Dans la vie de tous les jours, la journaliste refuse de donner son âge, « elle ne veut plus se plier à cette question paraissant anodine mais qui crucifie les femmes en les figeant dans une catégorie, car à l’approche de la quarantaine, elles semblent comme « périmées ». La séduction n’est plus de mise, le regard des autres glisse sur elles ».

L’essayiste ne donne pas de solutions miracles mais elle conseille néanmoins aux femmes de s’inspirer du parcours de femmes culte : Benoîte Groult, Lou Andréas-Salomé, Gisèle Halimi… « Admirées, courtisées jusqu’à soixante-cinq ans voire, pour certaines, au-delà, qu’avaient-elles compris qui nous échappe à nous, créatures angoissées par le passage du temps ? »

Des modèles de vie possibles parce que ces femmes cultivaient une liberté d’être affranchie du regard des autres même si comme le dit si bien l’auteure, au sein d’une société qui glorifie, dès la Renaissance, jeunesse, beauté et fécondité, il n’est pas aisé pour une femme mûre de maintenir un rôle lui assurant une considération familiale et sociale. Mais il ne faut pas s’enthousiasmer outre mesure car l’acceptation de l’altérité de la vieillesse qui n’est déjà pas du tout acquise pour les hommes est bien loin d’avoir un sens et une dignité chez les femmes.

Sinon, pourquoi d’une manière générale, les femmes se sentiraient obligées de mentir sur leur âge ? Si la décrépitude de l’âge ne représente pas le nirvana pour tout le monde, il faut reconnaître qu’elle est particulièrement pénalisante pour les femmes. Et alors qu’au moment où les hommes tirent de l’expérience due à l’âge des qualités certaines, comme la compétence, la sagesse ou encore la maîtrise de soi, les femmes qui n’ont plus à offrir la féminité de leur jeunesse, en vieillissant, perdent à coup sûr leurs principaux atouts.

Les magazines féminins ont bien essayé de « vendre » aux femmes une liberté d’être toujours femme à 60 ans, voire plus, le regard social reste toujours aussi violent envers les femmes qui prennent des rides. Beaucoup trouveront cet optimisme exagéré car l’âge n’est pas seulement dans la tête puisque la ménopause est une réalité, les conséquences du corps hormonal telles que les bouffées de chaleur, troubles du sommeil ou migraines aussi, mais qu’on le veuille ou pas, l’âge reste toujours une question d’apparence.

A mon humble avis, le vrai changement viendra du fait que les femmes seront de plus en plus autonomes financièrement et professionnellement, ce qui leur permettra d’être moins dépendantes du regard des autres. Seule barrière vraiment solide contre le jeunisme ambiant qui frappe d’abord les femmes, consommatrices effrénées de jeunesse artificielle, botoxées à outrance et qui “font” jeunes mais qui ne le sont pas réellement.

Hommes et femmes doivent accepter que leur visage témoigne de la vie qu’ils ont vécue, savoir vieillir dans la joie et apprécier les bienfaits du temps qui passe, mais ça, c’est une autre histoire.

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Abdellatif El Azizi