Il y a 36 ans, Malik Oussekine mourait sous les coups de la police

 Il y a 36 ans, Malik Oussekine mourait sous les coups de la police

Des fleurs et des lettres gisent, le 6 décembre 1987, devant l’entrée du 20 rue Monsieur-le-Prince à Paris où Malik Oussekine est mort, tué par la police, en marge d’une manifestation contre la réforme du système d’enseignement supérieur, plus connue sous le nom de la loi Devaquet. Michel GANGNE / AFP

Le 29 juin 2015, quand Charles Pasqua passa l’arme à gauche, on n’a pas pu s’empêcher de penser à Malik Oussekine. A la mort de ce jeune étudiant de 22 ans, matraqué à mort à Paris par deux « voltigeurs motoportés » au 20, rue Monsieur-le-Prince dans le 6e arrondissement.

 

C’était le 6 décembre 1986. C’était il y a 34 ans. On n’osait pas encore parler de violences policières comme aujourd’hui… Charles Pasqua était alors ministre de l’Intérieur et beaucoup auraient aimé voir le premier flic de France poursuivi devant la justice. Il n’en sera jamais rien. Jamais un juge français ne poursuivra Pasqua pour ce crime horrible. 

Les deux voltigeurs, responsables directs de la mort de Malik Oussekine, le brigadier Jean Schmitt, 53 ans à l’époque des faits, et le gardien Christophe Garcia, 26 ans, ne feront eux aussi pas un jour de prison. En 1989, ils sont traduits devant la cour d’assises de Paris pour « coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner » . Ils seront condamnés en janvier 1990 à une peine ridicule à 5 ans et 2 ans de prison avec sursis…. Une honte ! 

Rappel des faits :

Il y a 36 ans, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986 à Paris, en plein conflit entre le  gouvernement et les étudiants, Malik Oussekine, était tabassé à mort dans le hall d’un immeuble parisien, au 20, rue Monsieur-le-Prince, où il s’était refugié.

Etudiant à l’Ecole supérieure des professions immobilières (ESPI), Malik Oussekine était d’une santé fragile à cause de déficiences rénales, devant être dialysé trois fois par semaine. Au lendemain de sa mort,  Robert Pandraud, ministre délégué à la Sécurité, dira sans aucune honte: « Si j’avais un fils sous dialyse, je l’empêcherais d’aller faire le con la nuit ».

De santé fragile donc, Malik Oussekine préférait donc se tenir un peu à l’écart de tous les rassemblements étudiants. Mais cette fois-ci, selon certains de ses amis, le jeune Oussekine avait voulu se rendre à la manif. Les étudiants demandaient alors le retrait du projet de loi Devaquet, du nom du ministre délégué à l’Enseignement supérieur, qui instaurait une sélection à l’entrée de l’université.

Seul témoin du drame, Paul Bayzelon, fonctionnaire au ministère des Finances, habitant l’immeuble du 20, rue Monsieur-le-Prince, raconte la nuit du drame: « Je rentrais chez moi. Au moment de refermer la porte après avoir composé le code, je vois le visage affolé d’un jeune homme. Je le fais passer et je veux refermer la porte ». 

« Deux policiers s’engouffrent dans le hall, ajoute-t-il. Ils se précipitent sur le type réfugié au fond et le frappent avec une violence incroyable. Il est tombé, ils ont continué à frapper à coups de matraque et de pieds dans le ventre et dans le dos. La victime se contentait de crier: ‘je n’ai rien fait, je n’ai rien fait’ ».

Paul Bayzelon a dit avoir voulu s’interposer mais s’être fait lui aussi matraquer jusqu’au moment où il a sorti sa carte de fonctionnaire. Les policiers, présents dans le quartier pour disperser la manifestation, sont alors partis mais Malik Oussekine était mort.

Le lendemain, Alain Devaquet, l’auteur du projet de loi, présentait sa démission. Les étudiants défilaient en silence portant des pancartes « Ils ont tué Malik ». Le lundi 8 décembre, après de nouvelles manifestations, le Premier ministre Jacques Chirac annonçait le retrait du texte.

 

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Nadir Dendoune