Journée nationale d’hommage aux harkis, « une plaie ouverte »

 Journée nationale d’hommage aux harkis, « une plaie ouverte »

Une compagnie de harkis (harka) passe devant la tribune officielle à Alger le 8 mai 1957 pendant le défilé militaire commémorant la fin de la Seconde Guerre mondiale. (Photo by Jacques GREVIN / INTERCONTINENTALE / AFP)

Ce 25 septembre se tient la 17ème journée nationale d’hommage aux harkis, ces anciens soldats qui ont combattu aux côtés de la France durant la guerre d’Algérie, ainsi qu’aux autres membres des formations supplétives. À cette occasion, la ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, Geneviève Darrieussecq, chargée de la mémoire et des anciens combattants a adressé un message destiné à être lu lors de la cérémonie. 

Ils auraient été 263.000 Algériens à s’être engagés du côté français durant la guerre d’Algérie de 1954 à 1962. Au cours de celle-ci, l’armée française a recensé 160.000 contractuels harkis. Selon le consensus historique, ils ont été entre 60.000 et 80.000 harkis à être tués en Algérie après le cessez-le-feu du 19 mars 1962. Aujourd’hui en France, la communauté des harkis et de leurs descendants est estimée à 500.000 personnes.

«Des conditions d’accueil inhumaines de ceux transférés en France »

Le 25 septembre 2016, François Hollande, le président de la République d’alors déclarait : « Je reconnais la responsabilité des gouvernements français dans l’abandon des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie et les conditions d’accueil inhumaines de ceux transférés en France ». Dans un rapport de 2018 rendu à Geneviève Darrieussecq, la ministre déléguée auprès des armées, le préfet Dominique Ceaux écrivait les harkis, « c’est l’histoire d’un abandon ». Dans la même année, le nouveau président Emmanuel Macron, avait annoncé qu’il souhaitait « un geste mémoriel fort » pour « inscrire la mémoire des harkis dans le récit national », qui n’a toujours pas été mené. En juillet 2020, le chef d’Etat confie à l’historien Benjamin Stora une mission sur « la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie », pour « la réconciliation entre les peuples français et algérien », annonçait l’Elysée. Cette mission, dont les conclusions sont attendues à la fin de l’année, « permettra de dresser un état des lieux juste et précis du chemin accompli en France sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, ainsi que du regard porté sur ces enjeux de part et d’autre de la Méditerranée », avait expliqué la présidence.

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« Aux anciens harkis notre profonde reconnaissance »

Chargée de la mémoire et des anciens combattants, la ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, Geneviève Darrieussecq, a diffusé un message destiné à être lu lors de la cérémonie, que l’on reprend ci-dessous :

Chaque 25 septembre, la Nation rend un hommage solennel aux anciens harkis et aux autres membres des formations supplétives qui ont combattu pour la France au cours de la guerre d’Algérie.

De 1954 à 1962, cette guerre est l’histoire d’une déchirure : bouleversant les repères, tiraillant les opinions, divisant les familles des deux côtés de la Méditerranée.

Les harkis avaient fait le choix de la France et avaient rejoint l’armée française. Ils étaient, pour la majorité, des civils, armés par la France, avec pour missions d’assurer la sécurité de villages et de points stratégiques. Ces membres des formations supplétives participaient également à des opérations militaires aux côtés de l’armée française. Parmi eux, il y avait quelques femmes auxquelles nous pensons aussi aujourd’hui.

Toutes et tous ont servi la France avec loyauté, courage et abnégation.

Il y a cinquante-huit ans, les armes se sont tues. Les anciens supplétifs et leurs familles ont dû affronter de nouvelles épreuves. Pour ceux restés au pays, ce fut, bien souvent, l’horreur des représailles. Pour les autres, ce fut le déchirement, la fuite et l’exil.

N’accordant pas sa protection aux harkis restés en Algérie, la France a abandonné ses propres soldats. Ceux-là même qui lui avaient fait confiance, ceux qui s’étaient placés sous sa protection, ceux qui l’avaient choisie et qui l’avaient servie. Et pour ceux qui purent rallier l’autre côté de Méditerranée, elle ne sut pas les accueillir avec fraternité, les maintenant dans des camps de transit ou les hameaux de forestage.

Cette période de notre histoire reste une plaie ouverte dans notre mémoire collective. Depuis plusieurs années, la France, par la voix de ses plus hautes autorités, a reconnu avoir manqué à son devoir de protection et d’accueil. Cette reconnaissance, nous la renouvelons aujourd’hui de même que l’hommage aux combattants.

Nous souhaitons que l’histoire des harkis, ainsi que celle de leurs enfants, y compris celle de leur accueil, soit mieux connue, mieux reconnue et davantage transmise. C’est pour cela que nous poursuivons les actions de mémoire et l’organisation d’expositions. C’est pour cela que nous favorisons les rencontres entre des témoins et des jeunes. C’est pour cela que nous œuvrons à la valorisation des sites témoins de l’histoire des harkis par la création de stèles et de mémoriaux. Ces lieux sont des lieux de mémoire et de transmission qui méritent l’attention de tous. 

Les harkis et leurs descendants ont contribué et contribuent encore, par leur dévouement, leur courage et leurs réussites, à l’histoire, à l’identité et à la vitalité de notre pays.

Par cette journée nationale, nous voulons redire aux anciens harkis notre profonde reconnaissance et notre solidarité.

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Malika El Kettani