Justice. Le politologue François Burgat comparait pour « apologie du terrorisme »

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L’universitaire et politologue François Burgat sera jugé ce jeudi 24 avril 2025 devant le tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence, a rappelé son avocat maître Rafik Chekkat. De nombreux témoignages de soutien sur la toile évoquent « une cabale » judiciaire « infondée ».
Dans une longue vidéo de près d’une heure, l’avocat estime aussi ironique que paradoxal que des spécialistes des questions terroristes soient à leur tour poursuivis pour apologie du terrorisme : « La boucle est bouclée ! », s’étonne-t-il à propos de cette procédure initiée par la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) auprès du procureur de la République concernant des tweets de Burgat.
« Cette procédure vise à nouveau à réprimer les individus et organisations qui ont dénoncé les massacres à Gaza, réclamé la fin de l’impunité d’Israël, le respect du droit et l’application des résolutions internationales dans la région », a déclaré le juriste marseillais qui estime qu’il s’agit là d’une « énième atteinte, en France, à la liberté d’expression et aux libertés académiques ».
« J’ai infiniment, je dis bien infiniment plus de respect et de considération pour les dirigeants du Hamas que pour ceux de l’État d’Israël », avait écrit Burgat en janvier 2024.
Une plainte de l’OJE
Le politologue, ancien directeur de recherches au CNRS, auteur d’ouvrages de référence sur les questions liées aux monde musulman, avait pour rappel été placé en garde à vue en juillet dernier après une plainte déposée par l’Organisation juive européenne (OJE). Cette plainte faisait suite au partage d’une publication en lien avec la situation à Gaza, également sur le réseau social X.
Avant lui, plusieurs personnalités ont été inquiétées par la justice pour avoir partagé des publications en lien avec la guerre à Gaza, dont l’ancienne championne de basket Emilie Gomis, convoquée en février 2024 pour des faits « d’apologie du terrorisme » pour avoir diffusé une image dénonçant la colonisation de la Palestine par Israël. « On est pris dans une machine à broyer. Il faut être prêt à en subir les conséquences » avait-elle commenté à la sortie de son audition.
Le politologue Vincent Geisser a publiquement exprimé son soutien à François Burgat mardi :
« Avec François Burgat, je ne suis pas toujours d’accord et on se dispute souvent. Mais sa place n’est ni dans un commissariat de police, ni au tribunal. Sa situation est révélatrice d’une évolution inquiétante qui consiste à criminaliser de toute parole jugée « dissidente ». Et je reste persuadé que les travaux universitaires de François Burgat sur l’islam politique ont davantage contribué à faire reculer le terrorisme qu’ils ne l’ont encouragé. Pour preuve, il a été très souvent auditionné et consulté par de nombreuses institutions françaises et internationales. Pour cette raison, j’irais soutenir François Burgat au Tribunal d’instance d’Aix-en-Provence le jeudi 24 avril. Et j’encourage tous ses anciens collègues, doctorants et étudiants à exprimer leur soutien ».
Considéré comme l’un des plus éminents islamologues français, directeur de recherche émérite au CNRS aujourd’hui retraité, François Burgat est président du conseil scientifique et administratif du Centre arabe de recherches et d’études politiques (CAREP). Il consacre l’essentiel de ses travaux à l’étude des dynamiques politiques et des courants islamistes dans le monde arabe.
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