La justice française refuse l’extradition de Belhassen Trabelsi

 La justice française refuse l’extradition de Belhassen Trabelsi

Belhassen Trabelsi

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a rendu un avis défavorable à l’extradition vers la Tunisie de Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ex-dictateur Ben Ali, évoquant un « risque réel de traitement inhumain et dégradant ».

 

La chambre de l’instruction a ainsi considéré qu’il existait « un risque réel de traitement inhumain et dégradant pour Belhassen Trabelsi et de carences des contrôles en cas de mauvais traitement en détention ».

La cour d’appel estime par ailleurs insuffisantes les réponses des autorités tunisiennes concernant les circonstances du décès en détention de ses trois frères entre 2011 et 2020. Une allégation à laquelle a aussitôt réagi la justice tunisienne qui a de son côté affirmé hier jeudi avoir transmis « tous les documents requis ».

 

Soulagement du clan Trabelsi

« Je suis très content et j’ai une grande pensée pour mes trois frères », a simplement déclaré Belhassen Trabelsi à l’AFP à la sortie de l’audience. Mi-décembre, le parquet général de la cour d’appel avait pourtant demandé aux juges d’émettre un avis favorable à cette extradition.

Pour l’avocat de la défense, Me Marcel Ceccaldi, « le ministre de la justice tunisien a écrit que depuis la révolution, la Tunisie est un Etat de droit. La réponse de la cour d’appel d’Aix-en-Provence vient rappeler que pour parvenir à être un Etat de droit, il y a un long chemin à parcourir ».

Lors des évènements de la révolution de 2011, Belhassen Trabelsi, surnommé le grand parrain de la fratrie Trabelsi, avait pour rappel fui le pays, d’abord par voie maritime, pour s’installer au Canada. Pays qu’il avait à son tour quitté en 2016 après le refus d’Ottawa de lui octroyer l’asile politique.

Interpellé en mars 2019 à Marseille, il y a été mis en examen pour « blanchiment en bande organisée, recel, usage et complicité de faux documents administratifs », une affaire dans laquelle il est toujours sous contrôle judiciaire.

Quant à la justice tunisienne, elle le réclame pour au moins cinq affaires jugées ou en cours qui ont déjà valu à Belhassen Trabelsi d’être condamné par défaut à un total de plus de 33 ans de prison pour des infractions économiques et financières. Or, dans sa décision, la cour d’appel prend en compte la durée de la détention à purger au regard de son âge et de son état de santé.

 

Un camouflet pour les autorités tunisiennes

En France, la chambre de l’instruction a par ailleurs levé son contrôle judiciaire qu’elle avait imposé en mai 2019 dans le cadre de cette demande d’extradition. Sauf pourvoi en cassation du parquet général d’Aix-en-Provence, cette décision met donc un terme à cette procédure.

Belhassen Trabelsi avait déposé un dossier en 2016 auprès de l’organisme de justice transitionnelle tunisien, l’Instance vérité et dignité (IVD), pour obtenir une réconciliation en contrepartie d’un remboursement de fonds détournés. Il avait proposé un milliard de dinars (350 millions d’euros), selon l’IVD, mais l’arbitrage n’a pas abouti.

Le clan du dictateur Zine el Abidine Ben Ali s’était accaparé des pans entiers de l’économie tunisienne, captant notamment 21% des bénéfices du secteur privé tunisien en 2010, selon une estimation de la Banque mondiale.

Seif Soudani