Algérie. Des législatives sous surveillance internationale

 Algérie. Des législatives sous surveillance internationale

Il n’est pratiquement pas un scrutin en Algérie sur lequel ne pèsent pas des soupçons de fraude ; une présomption d’irrégularité confirmée récemment par le président Bouteflika. Photo Pascal Guyot / AFP.

C’est désormais officiel : les prochaines élections législatives seront étroitement surveillées par des observateurs internationaux. Invité hier mardi de la radio algérienne, le ministre algérien des Affaires étrangères Mourad Medelci a indiqué que ces observateurs seront issus de 5 organisations : ONU, UE (union européenne), UA (union africaine), OCI (organisation de la conférence islamique) et Ligue arabe.

Dans cette optique, une mission de précurseurs de l’UE sera bientôt en Algérie dans les prochains jours pour jauger l’état de préparation des futures élections législatives.

« Une mission de précurseurs va venir en Algérie pour se rendre compte de l’état de préparation institutionnel et organisationnel du prochain scrutin », a révélé Mourad Medelci, avant de préciser qu’un mémorandum d’entente consignant les conditions dans lesquelles évolueront les missions d’observation sera signé avec l’UE.

« Nous avons donné un préavis de quatre mois à l’UE et nous devons avoir son accord de principe et c’est à partir de là que nous allons, probablement au courant de ce mois ou au plus tard au début du mois prochain, commencer le processus qui va nous conduire à la signature d’un mémorandum d’entente préalable à l’observation », a-t-il indiqué. La même démarche sera suivie avec les autres organisations.

A entendre M. Medelci, les autorités algériennes ont décidé de leur propre chef, et non pas sous la pression d’une quelconque partie, de recourir à une surveillance international.

« Ce n’est pas la première fois que nous appelons de nos vœux que des observateurs étrangers viennent en Algérie »,  avance-t-il avant d’ajouter : « Il se trouve que parmi les observateurs étrangers, il y en a qui ont précisé les systèmes dans lesquels ils doivent fonctionner, comme c’est le cas notamment de l’UE et de la Ligue arabe ».

Selon lui, le président Bouteflika avait donné instruction pour que ces observateurs puissent « travailler en toute liberté et se déplacer avec les effectifs qu’ils peuvent déployer sans contrainte aucune».

Elections transparentes, un désir vain ?

Pourtant, en novembre 2011, une délégation européenne a effectué une visite en Algérie pour discuter avec le gouvernement de la possibilité de l’envoi d’observateurs européens en vue de superviser les prochaines élections.

Mieux, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a conditionné sa participation aux prochaines législatives par la présence d’une surveillance internationale « massive et qualifiée ». Réponse du berger à la bergère : la mission d’observation est une opération que « nous voulons plus importante et plus précise », a renchéri M. Medelci.

A coup sûr, sans la demande insistante et ferme de l’UE, le gouvernement algérien n’aurait probablement pas fait cette fleur au parti de Saïd Sadi qui cultive toujours des appréhensions quant à la volonté des dirigeants d’organiser une élection honnête et transparente.

« Dans le meilleur des cas, la convocation du corps électoral ne pourra se faire qu’au début janvier 2012. Ce qui donne un délai de quatre mois avant la date du vote. La manipulation des législatives a déjà commencé. Le pouvoir algérien qui veut atomiser l’Assemblée par les partis croupions et les « indépendants » annonce, par ailleurs, sa disponibilité pour une surveillance internationale mais crée les conditions de l’impossibilité de sa mise en œuvre », a prévenu le RCD en décembre au lendemain du discours du chef de l’Etat.

« Dans les faits, on risque, sauf imprévu, de se retrouver avec quelques fonctionnaires de l’Union africaine et de la Ligue arabe confortablement installés dans les hôtels algériens avant de signer la traditionnelle déclaration de satisfaction réglée comme du papier à musique », a-t-il également ajouté.

La suspicion du RCD n’est pas infondée : il n’est pratiquement pas un scrutin en Algérie sur lequel ne pèsent pas des soupçons de fraude.

Une présomption d’irrégularité confirmée par le président Bouteflika lui-même qui, à l’ouverture de l’année judiciaire en décembre 2011, a soutenu sans ambages que « par le passé, nous avons connu des élections à la Naegelen (en référence à Marcel-Edmond Naegelen, gouverneur général dans l’Algérie colonisée, qui organisa des élections truquées en 1948, ndlr) ».

Reste à savoir si les observateurs internationaux pourront vraiment préserver les suffrages des Algériens de tout détournement.

Yacine Ouchikh

Yacine Ouchikh