« Derrière les fronts », le documentaire sur la résilience des Palestiniens, sort en DVD

 « Derrière les fronts », le documentaire sur la résilience des Palestiniens, sort en DVD

Alexandra Dols a obtenu le 23 octobre 2017 le « Sunbird »


Pour Alexandra Dols, faire des films, c’est résister. Son premier documentaire, qui date de 2008,«MOUDJAHIDATE, des engagements de femmes pour l’indépendance de l’Algérie » en était déjà la parfaite illustration. 


L’année dernière, en 2017,elle a récidivé avec la sortie au cinéma de son deuxième film « Derrière les fronts : résistances et résiliences en Palestine ». Un documentaire qu’elle a accompagné aux quatre coins de la France sur une centaine de débats et qui a reçu un super accueil du public. Le film a été également projeté dans onze pays, lors de nombreux festivals ; de l’Angleterre à l’Espagne, en passant par Washington DC, le Chili et la Tunisie, sans oublier bien sûr la Palestine. A l’occasion de la sortie du DVD*, nous avons voulu revenir avec elle sur cette folle année. 


Il y a deux ans, votre film sortait en salles. Il détonne par son originalité…


De par son sujet – les résistances et résiliences du peuple palestinien – et de par son traitement – en plaçant la caméra uniquement du coté des palestinien-nes – en parlant non pas des traumas des Israéliens mais de ceux des colonisés, le film était déjà à contre-courant. Il n’a pas été financé par les institutions, mais autoproduit et tourné sans autorisation. Depuis le début, on a travaillé dur pour fissurer les murs et faire sortir ce film dans le réseau cinématographique mainstream. 


Qu’il existe était donc déjà une réussite pour vous ?


Effectivement. Et la suite a été encore plus forte : la réception du film par le public et sa capacité à laisser des traces dans la réalité. Sortir un film dont le personnage conducteur est une femme, palestinienne, psychiatre, musulmane, portant le hijab, est un défi. Je pense également que le film répond précisément à des besoins de l’époque : sortir des représentations habituelles issues du « choc des civilisations » et voulues par la propagande israélienne, dans lesquelles les arabo-musulmans sont tous des barbares, homophobes, violents, incultes et cruels tandis que les femmes musulmanes sont présentées comme soumises, en pleurs ou alors suspectes.


Dans « Derrière les fronts », les intervenant-es ne sont pas là pour susciter de la condescendance ou un élan humanitaire. Elles et ils témoignent de leur sort avec dignité, partageant leur expertise politique et professionnelle tout en nous prenant à partie notre conscience et la responsabilité politique de la communauté internationale. 


Vous avez fait près de cent débats. Racontez-nous un peu les échanges avec le public. 


Ils ont été très intéressants. Il y en a quelques uns qui m’ont marquée. Par exemple, certains spectateurs ont trouvé que ce film montrait un « rapport apaisé et apaisant à la religion ». D’autres ont été touchés par « la beauté du film et sa poésie ». 


En Palestine comme en France, beaucoup étaient heureux de ne pas sortir de la projection « abattus».Pour eux, « Derrière les fronts » suscitait au contraire de l’espoir, un élan pour un meilleur avenir, bien que mon documentaire restitue les souffrances et l’enfermement du peuple palestinien.

Vous êtes satisfaite aussi pour d’autres raisons…


Effectivement. Je suis heureuse parce que le public a été varié. Le film n’a pas été vu que par des « convaincus ». A la dernière projection en France, il y a même eu une dame dont la fille est partie rejoindre l’armée israélienne, qui est venue me remercier…Elle m’a dit que le film l’avait informée sur une réalité qu’elle ne connaissait pas bien et qu’elle voulait acheter le dvd pour en discuter avec sa fille à son retour. C’était inattendu !


Quel bilan tirez-vous de cette année ? 


Il est encore un peu tôt pour tirer un bilan définitif. J’ai grandi avec ce film. Déjà « cinématographiquement », en expliquant mes choix et parti-pris lors des rencontres. Politiquement, en dépassant les tentatives d’intimidation et l’autocensure qui flotte autour de la Palestine quand il s’agit de témoigner de l’Occupation israélienne. En termes d’endurance aussi, en tout et pour tout, cela fait maintenant cinq ans que je porte ce film : de l’écriture à sa distribution et maintenant à l’édition des DVD.


Au niveau des impacts politiques du film, il est difficile de quantifier ce qui est « invisible ». Je ne peux pas dire comment ce film a pu contribuer à faire bouger les consciences. Par contre, j’ai pu constater à quel point les propos de Samah Jabr (NDLR : l’un des personnages du film) parviennent à re-politiser le psychologique, à décentrer la psychothérapie telle qu’elle est envisagée ici en France, mais aussi à créer du lien entre des professionnel-les de la santé mentale qui aimeraient soutenir la Palestine.


C’est une grande fierté de contribuer à la diffusion du travail et de la pensée de cette psychiatre et écrivaine palestinienne décoloniale, y compris auprès du grand public. Et puis vous savez, un film sert à créer du lien, à faire parler, à se rencontrer. Je peux attester de la réussite et de la mobilisation importante des groupes de solidarité avec la Palestine dans les projections débats qui nous amènent aujourd’hui à près de 8000 spectateurs.





*Pour celles et ceux qui aimeraient se procurer le DVD, il est possible de le commander en France auprès de votre librairie, y compris en Suisse, Belgique et au Maghreb. Sur internet également, sur Ebay, Films&Documentaires.com et Les Mutins de Pangée. Pour la VOD, également sur ces deux derniers sites. Pour les achats institutionnels (CDI, médiathèques, fonds audiovisuels, etc.) le DVD est disponible chez ADAV, COLACO.


Vous pouvez retrouver les informations sur le site du film: http://derrierelesfrontslefilm.fr/dvd-vod/


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Nadir Dendoune