Les dribbles de la liberté

 Les dribbles de la liberté

crédit photo : Presse


Le documentaire de Naziha Arebi raconte le parcours de femmes libyennes d’origines sociales diverses dans leur quête footballistique, avec, en toile de fond, un pays écorché par la guerre civile. 


En 2014, au championnat d’Afrique de football, l’équipe libyenne réussit l’exploit de se qualifier pour les demi-finales contre le Zimbabwe. Dans les rues de Tripoli, des drapeaux couronnent les avenues, les bars sont bondés. Pas une femme à l’horizon. Chacun reste les yeux rivés sur les écrans de télévision.


Halima, gardienne de l’équipe féminine libyenne, suit le match depuis la rue. Les tirs au but arrivent, chaque occasion marquée enivre la foule. La Libye sort vainqueur. Le peuple est en liesse. Dans son véhicule, elle ne peut cacher son énervement : “Quand ce sont des hommes qui jouent, ça ne dérange personne. Mais quand c’est nous, ce n’est pas possible !”


 


Tourné sur cinq ans


Réalisé par la Britanno-Libyenne Naziha Arebi, Freedom Fields, retrace le parcours du combattant de ces femmes qui luttent au quotidien, dans la Libye post-Kadhafi à feu et à sang, pour pouvoir jouer au football. Elles espèrent représenter leur pays lors de compétitions féminines à l’étranger, mais tout semble leur barrer la route. Ce périple épuisant prend forme sous nos yeux, avec, en toile de fond, des balles qui se perdent et un pays en détresse.


Pendant près de cinq ans, Naziha Arebi a suivi, ­caméra à la main, la vie de ces femmes passionnées et ­déterminées, de classes sociales et origines géographiques différentes, certaines venant des camps de réfugiés gérés par les Nations unies, d’autres de la banlieue de Tripoli. Pour chacune, le football est une échappatoire. Pourtant, ce plaisir leur est confisqué avec férocité par les hommes qui les entourent : l’Etat, la Fédération de Libye de football, qui annule in extremis leur voyage en Allemagne, l’organisation salafiste Ansar al-Charia, qui condamne celles “qui se dénudent poussées par une forme d’occidentalisation des mœurs.”


 


Un regard intimiste


Avec acharnement, entre désillusions et petites victoires, et malgré des campagnes horrifiantes sur les réseaux sociaux, elles se battent contre une société qui utilise la religion comme bouclier face à la libération de la femme. “Elles ont commencé leur mouvement militantiste là où elles étaient. Elles n’ont pas eu le privilège de choisir la forme de leurs actions ou le lieu où elles allaient prendre place, analyse la réalisatrice. Elles étaient dans l’urgence de ce combat.”


Avant tout intimiste, ce documentaire tente de dresser le portrait d’une Libye en conflit. Le spectateur est ainsi immergé dans ce pays qui a participé à l’élan démocratique arabe, où les coupures d’électricité sont récurrentes, où les mœurs se durcissent et où la liberté n’est pas pour tous. Un trait d’espoir est cependant esquissé à la fin, promettant ainsi un avenir meilleur. 


Dates et lieux de projections ici

Donia Ismail