Kheiron : Qui sème le sarcasme récolte le tempo

 Kheiron : Qui sème le sarcasme récolte le tempo

Crédit photo : Presse


MAGAZINE NOVEMBRE 2017


Maître de l’improvisation, réalisateur de talent, ce roi du stand-up franco-iranien, révélé par la série “Bref” (Canal+), pioche chaque soir dans sa réserve et crée un spectacle unique en totale interaction avec le public. 


Un concept inédit. Plutôt que de répéter les mêmes punchlines, cet accro des planches trouve sa dose d’adrénaline dans l’im­prévu, la tchatche. En parfait illusionniste, il garde tout le mystère entre écriture et improvisation. Sa trouvaille ? Un stock de vannes déjà prêtes, soit trois heures de spectacle, dans lesquelles il puise selon le public du jour. “Qui fait le métier de ses rêves, qui est croyant, qui est en couple ?” Il interpelle ainsi les spectateurs afin de les cerner et de leur lancer ses reparties les plus cinglantes, taillées sur mesure.


Dans cette salle à 180 degrés, où l’assemblée est éclairée, l’artiste est à l’affût des attitudes, des looks et des réactions de son public. Et rien ne lui échappe. “Je vous vois tous !” répète-t-il. ­Racisme, religions, attentats, couple, pédophilie… Son registre politiquement incorrect est corrosif, mais ne franchit jamais la ligne jaune. Grossier, parfois “trash”, mais sans une once de vulgarité. Cruel, mais jamais méchant gratuitement. Même s’il assure : “La gratuité est toujours payante en humour !”


 


Un rire toutes les sept secondes


Son obsession ? Le rythme. Fin connaisseur de la question (il est aussi rappeur), Kheiron maintient son “flow” à une cadence effrénée. Il sème ses sarcasmes et récolte le tempo. Son obligation de résultat ? Un rire toutes les sept secondes. Pari gagné. Son public, plutôt trentenaire, cosmopolite, victime consentante de ses blagues féroces, se régale. Car avec ses faux airs de sale gosse espiègle et son sourire ultra-large, tout passe. Ceux qui ne souhaitent pas être “charriés”, il les invite à se signaler et il les laissera tranquilles. Mais certains hésitent : serait-ce un piège tendu par ce professionnel du quatrième degré ? Ne va-t-on pas au contraire se faire casser deux fois plus ?


Pour en savoir davantage sur cet artiste pour qui le stand-up est “l’art de la nudité”, mais qui se dévoile très peu sur scène et “se fout complètement de livrer sa vision du monde”, il faut plutôt aller voir du côté du cinéma.


 


Il met en scène Deneuve et Dussollier


En 2015, il écrit, réalise et interprète son premier long-métrage, Nous trois ou rien, mettant en scène l’histoire de ses parents. Ces Iraniens, opposants au régime du shah, puis à celui de Khomeiny s’exilent en France et s’installent avec leur bébé Kheiron, en ­banlieue parisienne, au début des années 1980. Pour un premier essai, lui qui n’était pas cinéphile réussit un coup de maître. Subtil équilibriste, il trouve la juste mesure entre rire et émotion.


Fort de ce succès – plus de 650 000 entrées au box-office et une critique quasi unanime –, il enchaîne avec son deuxième film, Mauvaises herbes, tourné depuis cet été en France et au Maroc. Une comédie dramatique sur l’éducation qui met en scène son épouse, Leila Boumedjane, Catherine Deneuve et André Dussollier. Sortie prévue l’an prochain.


Kheiron prépare aussi La Triade, un spectacle avec ses amis ­humoristes Donel Jack’sman et Bun Hay Mean. A la scène comme à l’écran, 2018 sera l’année Kheiron. 


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La rédaction du Courrier de l'Atlas