Mohammed VI : un roi bien vivant

 Mohammed VI : un roi bien vivant

Photo : AFP

« Gaspiller des balles pour faire tomber une chouette », c’est un proverbe marocain qui signifie qu’on se trompe à user des mêmes ficelles alors que leur effet s’avère toujours nul. Déclarer le roi du Maroc décédé le lendemain de la fête du trône alors que le souverain chérifien est bien visible entre discours, cérémonie d’allégeance et autres festivités relève autant du mauvais goût que de la bêtise caractérisée. 

Cette fois-ci, ils ont choisi Twitter pour balancer cette rumeur, le dimanche (30 juillet), publiée sur le site de microblogging. Comble du ridicule, ils donnent le lien vers le site Nécropédia (un site humoristique spécialiste de la parodie).

La seule réponse possible à ces enfantillages viendra du Celebrity Post, avec ce sondage où une large majorité (67%) jugeaient, dimanche soir, que les rumeurs du décès de Mohammed VI étaient de très mauvais goût.

Les services algériens qui s’affairent fébrilement pour manipuler l’information ont déjà « tué » Mohammed VI en 2018 après son opération chirurgicale. Une fake news lancée à l’époque par un site proche du Polisario faisant état d’une prétendue « mort » du roi Mohammed VI, suite à une « prétendue crise cardiaque ».

Il semble ici qu’il s’agit de la seule réponse qu’auraient trouvée les services algériens à la main tendue de Mohammed VI qui a réitéré dans son discours du trône l’entière disponibilité du Maroc de reprendre les relations entre les deux pays, d’ouvrir les frontières et de construire une nouvelle page dans l’avenir du Maghreb.

Pourquoi et comment les services algériens continuent de se fourvoyer dans des campagnes de désinformation qui consistent à répandre des informations fausses et trompeuses sur le royaume que personne ne croit ?

Il faut comprendre que l’imaginaire des généraux algériens traumatisés par la cuisante défaite de la guerre des Sables en 1963 où Chengriha a été fait prisonnier, est désormais nourrie par une autre guerre, celle du cyberespace, territoire virtuel où les fantastiques possibilités techniques peuvent être détournées pour quelques dollars de plus.

Ces manipulations grossières de l’information sont menées par les hommes du général M’henna Djebbar. La Direction générale de la lutte contre la subversion (DGLS), qui garde un œil sur les opposants de l’intérieur, traque les hommes des partis et associations progressistes tels que le Rassemblement actions jeunesse (RAJ), le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) ou encore le Parti socialiste des travailleurs (PST), a pris également en charge le volet concernant l’influence dans les médias, la chasse aux blogueurs contestataires et la manipulation de l’information pour « déstabiliser les pays ennemis », entendez par là essentiellement le Maroc.

Jusqu’à présent, l’expérience a montré que les services algériens chargés de diffuser des fake news n’y connaissent pratiquement rien en matière de réseaux sociaux et de guerre psychologique, même si des entreprises occidentales ont bien participé à des campagnes de dénigrement en fabriquant notamment de faux profils, avant de les activer sur les réseaux sociaux.

Ces faux profils existent sur Twitter, Facebook et Instagram, et écrivent souvent des commentaires sous des vidéos YouTube. Exemple de flop, le cas du compte Twitter MarocTV Info, détourné par ces mêmes services, le compte à l’origine de cette page appartenait au site de propagande algérienne, lexpressquotidien.dz. Il y a aussi des noms qui reviennent souvent comme celui de Salamah Oufkir, un personnage fictif au nom évocateur.

Pourtant, en plus de l’espionnage classique, les services algériens disposent de sommes colossales pour mener des opérations de manipulations de l’info, de lobbying et d’influence à grande échelle, qui passent d’un côté par « l’achat » de personnalités prêtes à clamer n’importe quoi sur l’affaire du Sahara et d’un autre côté, par la subversion idéologique de membres éminents des élites politiques occidentales, sur la même rengaine « l’Algérie, libérateur des peuples opprimés face au royaume, ennemi de ces mêmes peuples ».

Said Sadi, éminent homme politique algérien a bien résumé l’état d’esprit qui prévaut chez les dirigeants de ce pays en précisant que « l’histoire algérienne est une somme d’allégations fantaisistes et d’omissions tragiques », voilà, tout a été dit.

De toutes les façons, n’attendons pas que l’ardeur de ces manipulateurs de l’info retombe car « rien ne va mal en Algérie sans que soient impliquées les intentions malveillantes des autres, que ce soit la France, le Maroc ou tout autre pays qui servira de repoussoir idéologique commode » (Le mal algérien de Jean-Louis Levet et Paul Tolila).

Que les choses soient claires : autant il ne faut rien attendre de l’Algérie au pouvoir, celle des généraux séniles en proie à des guerres intestines pour rester au pouvoir, celle d’une classe politique aussi corrompue que le reste des apparatchiks, autant l’Algérie démocratique, celle du Hirak, de la diaspora, celle des nouvelles générations, l’Algérie d’une opposition farouche dont  les principaux leaders ont dû se réfugier à l’étranger pour échapper à la mort ou à la prison, est porteuse d’espoir et laisse entrevoir une issue favorable pour ce peuple magnifique.

Le Hirak, qui a enterré Bouteflika et « le clan des Siciliens » formé par son frère, gronde toujours, même si les mouvements de protestation populaires et pacifiques ont été brutalement stoppés par le Covid.

Mais cette démocratie authentique et l’instauration d’un État débarrassé de la tutelle des militaires dans ce que nombre d’Algériens ont appelé la « deuxième guerre d’indépendance » reste toujours d’actualité, à voir l’activisme des mouvements d’opposition en Europe et ce, malgré les complicités d’un Emmanuel Macron prompt à flirter avec le régime d’Alger pour faire taire ces voix.

La réponse des « clans » (militaires, services secrets, présidence), érigée en « mépris pour le peuple », a été confiée à des services de sécurité rompus à la manipulation, à une justice instrumentalisée, et à des cadeaux offerts gracieusement sur la manne pétrolière à l’international, pour avoir la bénédiction de chefs d’Etat peu regardants sur les principes moraux, la France en premier.

Il suffit d’étudier dans le détail les compromissions entre dirigeants algériens et français, pour se rendre compte de la complicité de l’Hexagone dans la situation exécrable que vit l’Algérie, un pays riche, à la population pauvre.

Si le Hirak a bien redonné espoir à toute une société, aujourd’hui, l’espoir vient aussi des contradictions des clans mafieux eux-mêmes, puisqu’une guerre intestine entre les affidés du général Chengriha et ceux de d’Abdelmadjid Tebboune, le président algérien, qui dispose de quelques soutiens au sein des services de renseignement laissent présager d’une issue sanglante entre les deux clans.

Pour info,  et selon nos informations, Tebboune se sentirait plus sûr de lui depuis qu’il a mis dans son giron, la Direction générale de la lutte contre la subversion (DGLS qui dépend directement de la présidence de la République).

Sous les ordres du coordinateur des services de sécurité et conseiller du président, la DGLS est dirigée par le général M’henna Djebbar, mis à la retraite par l’ex-président Abdelaziz Bouteflika et jeté en prison par le chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah en octobre 2019.

En cherchant à affaiblir l’influence des militaires, les hommes de Tebboune ne lui rendent pas service, et nul doute que la guerre de clans au sein du pouvoir, menée d’un côté par

Khaled Nezzar, ex-ministre de la Défense nationale et l’un des hommes clés de la terrible répression de la décennie noire, et d’un autre côté par Boualem Boualem, le puissant conseiller d’Abdelmadjid Tebboune. Atavisme, égarement ou pur cynisme ? La politique en Algérie relève souvent de la psychiatrie.

En attendant  un nouveau mai 68 algérien qui ne saurait tarder, il est clair que cette guerre fratricide qui risque d’emporter les deux clans en même temps ouvrira des perspectives réelles à la paix dans la région, et le Maroc n’a qu’à attendre que le fruit soit assez pourri pour tomber.

Les élites restées au pays sont muselées mais pas disparues, même celles qui se sont clientélisées attendent patiemment leur heure, alors qu’une diaspora forte de ses cadres supérieurs est décidée à ne pas lâcher le morceau.

Que veut le peuple ? Ce jour-là, ce sera alors l’occasion de négocier avec ces nouvelles forces l’instauration de ce véritable Maghreb Uni que les peuples algérien et marocain attendent avec impatience car depuis Gandhi, on a bien compris que « la paix est une vertu inconditionnelle, non pas le fruit de négociations mais plutôt une attitude préalable envers tous les hommes », une devise qui a toujours animé le chef d’Etat marocain dans ses élans de bienveillance envers « ces frères algériens ».

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Abdellatif El Azizi