Algérie : 60 cas d’immolation en quelques mois

Le phénomène des immolations s’étend comme un feu  de paille en Algérie, et ce malgré les dépenses exceptionnelles engagées par l’Etat à travers de nombreuses mesures sociales d’apaisement lancées vers la population dont une frange semble avoir perdu tout espoir.

Relayés par la presse locale, les tentatives de suicide par immolation, une soixantaine dénombrées depuis le mois de janvier, dont quelques unes ont été mortelles, expriment une profonde détresse face aux problèmes du quotidien, tel le chômage, les problèmes de logement subissant depuis toujours une grave crise dans le pays. Ou face encore à d’autres difficultés de la vie, que les Algériens considèrent comme insurmontables ou contre lesquelles ils n’ont plus la force de lutter.

Ces derniers jours, deux cas ont malheureusement défrayé la chronique par ce geste définitif. Vendredi, un jeune de 17 ans de la région de Tissemsilt, au sud-ouest d’Alger, s’est immolé devant le commissariat où il avait été convoqué pour vol. Notons qu’il y a un mois à peine, un autre jeune s’était immolé devant le même commissariat. Acte qui s’est soldé par son décès le 29 mai, selon le quotidien arabophone El-Khabar.

Samedi dernier, une femme de 37 ans originaire de la région d’El Tarf à l’est du pays, en désespoir de cause, n’a pas hésité à s’asperger d’essence et d’allumer le feu devant un tribunal fermé. Elle voulait faire entendre sa voix par le feu et le sang pour protester contre une décision du même tribunal dans une affaire d’héritage l’opposant à son frère. Brûlée au 3ème degré, elle est à présent soignée à l’hôpital régional d’Annaba, ont indiqué des sources locales à l’AFP.

Le chapelet morbide se déroule encore : un père de famille est mort samedi des suites de ses blessures, une semaine après s’être immolé par le feu pour exprimer sa colère de ne pas bénéficier d’un logement social à Souk Ahras, à 600 km à l’est d’Alger.

Depuis le lancement des protestations sociales en Algérie, accompagnant le printemps arabe dans la région, les tentatives d’immolation ont ponctué la vie des algériens sans pour autant susciter des réactions à grande échelle de la part des autorités ou provoquer une quelconque perturbation sociale du pays. Quant aux médias, celles ci se contentent de rapporter les faits.

Duplicata de l’action de Mohamed Bouazizi le tunisien, qui a précipité le départ du président Ben Ali et a été « l’étincelle » pour mettre en mouvement la première révolution arabe, l’immolation par le feu est devenue en Algérie un acte courant. Des gestes qui restent pour l’heure isolés mais non moins extrêmes faisant état d’un désespoir qui ne l’est pas moins ! 

Soufia Limam

Soufia Limam