3 questions à Samia Maktouf

 3 questions à Samia Maktouf


MAGAZINE DECEMBRE 2017


Avocate d’une vingtaine de familles de victimes des attentats du 13 novembre et auteure de Je défendrai la vie autant que vous prêchez la mort (Michel Lafon).


Quel regard portez-vous sur la nouvelle loi anti-terroriste, entrée en vigueur le mois dernier ?


Cette loi permet de pérenniser l’état d’urgence. La France, qui est un Etat de droit, ne peut pas continuer à légiférer sous l’égide de lois d’exception et provisoires. Je me félicite qu’on ait remplacé, dans cette procédure, le juge administratif par le juge judiciaire, lequel est garant des libertés fondamentales. Pour autant, il faut rester vigilant quant au respect de ces dernières. Elles sont un des gages de notre état de droit et de notre démocratie.


 


Quelles leçons tirez-vous du procès d’Abdelkader Merah ?


Il nous a tous meurtris et, a fortiori, les parties civiles. Même si nous ne sommes pas satisfaits du verdict, ce procès reste exemplaire. Il a eu le mérite d’exister. Il a permis de montrer que notre démocratie est capable de juger les pires criminels – qui ont tenté de mettre à genoux nos militaires et de tuer des enfants parce qu’ils étaient de confession juive, et de leur offrir un procès équitable. C’est la gloire de la démocratie face à la barbarie. Il a permis d’ouvrir les yeux sur l’endoctrinement terroriste, phénomène qu’on n’a pas su décrypter à temps. La dissimulation n’était pas condamnée par notre droit. A présent, il va falloir que le législateur adapte la loi au “comportement” de ceux qui agissent dans l’ombre et tire les leçons de l’affaire Merah. Pour conclure, je rappelle que les premières victimes du terrorisme sont les musulmans et que ce procès n’était pas celui de l’Islam mais celui d’une idéologie mortifère.


 


Quel sort la France doit-elle réserver aux veuves et enfants de jihadistes actuellement en Syrie ?


Soit on est un état de droit, soit on ne l’est pas. La France ne peut pas abandonner des enfants innocents qui sont nés dans la terreur. Je ne parle pas des soldats mineurs mais de ceux qui sont âgés entre 24 et 36 mois et dont les parents sont français et convertis dans 30 % des cas. S’ils rentrent avec leurs mères, ces dernières feront l’objet d’une procédure judiciaire. Les remettre dans des foyers, c’est créer de nouveaux Mohammed Merah, rappelons-nous qu’il y a grandi. Des grands-parents ont saisi le Président Macron sur cette question, et ont manifesté clairement le souhait d’élever la chair de leur chair et d’éviter à leurs petits-enfants d’être endoctrinés et de devenir un jour des bombes humaines. 


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Fadwa Miadi