Des dizaines de millions de dinars de pertes dues à la pollution à Gabès selon un rapport

 Des dizaines de millions de dinars de pertes dues à la pollution à Gabès selon un rapport


L’Office de développement du sud tunisien (ODS) a rendu public un rapport évaluant les impacts de la pollution de la région de Gabès sur son économie. Le constat a de quoi faire réfléchir les autorités et les acteurs locaux sur le modèle de développement mené jusqu’à présent, basé sur l’industrie chimique, notamment la transformation du phosphate tiré des mines de Gafsa.


Le coût annuel de dégradation de l‘environnement (CDE) par la pollution industrielle du gouvernorat de Gabès a atteint jusqu’à 76 millions de dinars pour l‘année 2015 (environ 35 M€ de l'époque), soit 200 dinars par habitant de la région. L’essentiel des pertes est supporté par le secteur de la pêche (47 %), suivi du tourisme (33 %), selon les données du rapport de l'ODS.


Ce document a été commandé dans le cadre du Projet d’appui à la gouvernance environnementale locale de l’activité industrielle à Gabès (PGE Gabès). Financé par l’Union européenne à hauteur de 5 M€ et mis en œuvre depuis 2015 par l’agence Expertise France, ce programme vise à impulser une nouvelle dynamique de développement durable pour la région de Gabès. Grâce à la collaboration avec les autorités nationales et locales, notamment le gouverneur, ainsi qu’avec de nombreuses associations de la région, le PGE a permis une prise de conscience citoyenne du problème posé par le modèle de développement mené depuis l’implantation des industries chimiques dans les années 70.


Auparavant, la région était connue pour la richesse de sa biodiversité, tant marine que terrestre, ainsi que pour la qualité des productions agricoles de son écosystème oasien, le seul du pourtour méditerranéen. Situation totalement bouleversée par les rejets polluants dans l’air et en mer du Groupe chimique tunisien (GCT). 42 000 m3, soit 12 500 tonnes de phosphogypse sec, sont rejetés quotidiennement dans le Golfe de Gabès. En 30 ans, on atteint le chiffre vertigineux de 135 à 150 millions de tonnes de phosphogypse ainsi déversés en mer sans traitement.


Un projet pharaonique de modernisation et de délocalisation des unités du GCT afin de réduire significativement la pollution et même de mettre fin aux rejets de polluant en mer a été annoncé à plusieurs reprises. « La nouvelle ville industrielle sera établie selon des standards environnementaux, tandis que de nouvelles activités économiques respectueuses de l’environnement seront créées à la place de l’actuelle zone industrielle », assure le gouverneur de Gabès, Mongi Thameur. Le projet rencontre toutefois une certaine résistance d’habitants de Menzel Lahbib, localité censée accueillir la nouvelle zone industrielle.


Mais, si elle est le principal facteur de dégradation de cet environnement, la pollution industrielle n’en est pas la seule responsable. Il faut en effet y ajouter la surpêche, responsable d’une part importante de la baisse des stocks halieutiques et l’urbanisation qui se fait au détriment des oasis. L’objectif du PGE était donc tout à la fois de travailler à trouver des solutions pour baisser la pollution industrielle et de mobiliser les communautés pour entamer une transition vers un développement plus durable. Des initiatives portées localement ont donc été financées dans l’agriculture, la pêche artisanale, la restauration de la biodiversité, l’autonomisation des populations vulnérables ou encore le traitement biologique des eaux usées.


Rached Cherif


À lire aussi :


Tunisie. L’environnement : enjeu des élections locales à Gabès


Tunisie. La pollution n’est pas une fatalité, veulent croire les Gabésiens

Rached Cherif