Tunisie. « Moi j’y vais », vraiment ?

 Tunisie. « Moi j’y vais », vraiment ?

#TUNISIEMOIJYVAIS


 


Une campagne (soutenue par de nombreuses célébrités) a été lancée pour inciter les touristes à opter pour la Tunisie malgré les récents événements. L’initiative, louable, risque de se heurter à une réalité bien morose.


 


« C’est une catastrophe ». Après le tragique attentat du vendredi 26 juin, sur une plage très fréquentée de Sousse, la ministre du tourisme tunisien n’a pas caché ses craintes pour l’avenir d’un secteur déjà décapité après les attentats du Bardo (chute de 25% de l’activité touristique).


Dans un pays où le tourisme représente environ 7% du PIB et quelques 400 000 emplois directs et indirects, la tuerie de vendredi, à quelques jours du lancement de la saison estivale, vient plomber un peu plus le moral d’un pays qui avait déjà bien du mal à retrouver ses touristes.


Avant l’attentat du Bardo, entre janvier et février les chiffres étaient déjà en berne (-2,1% de recettes en dinars, -8,6% de nuitées et -19,5% d’arrivées aux frontières selon les chiffres du ministère).


L’après-révolution avait déjà été difficile à gérer. Les touristes, soucieux, gardaient un œil sur les soubresauts de cette nouvelle Tunisie. Les premières années de cette démocratie n’ont pas rassuré puisque par rapport à 2010, les entrées en Tunisie étaient en baisse de 17,5% et les nuitées de 27,7% en 2015.


 


« Ils ne vont pas vouloir aller en vacances là-bas »


Ce second attentat va plomber la saison estivale tunisienne. Après les tueries du Bardo, le tourisme avait enregistré un fort recul de 25,7% sur un an du nombre de touristes et de 26,3% des recettes touristiques en devises, selon la Banque centrale tunisienne.


Cette fois cela risque d’être encore pire prévient un professionnel français du tourisme, pour qui la symbolique a une grande importance. « L’attentat contre le musée du Bardo c’était déjà très difficile, mais là, les touristes ont été tués sur la plage. C’est ce que les gens vont voir, et clairement ils ne vont pas vouloir aller en vacances là-bas », avait-il déclaré à l'AFP, juste après l'attentat de Sousse.


En France, le ministère des Affaires étrangères déclare que peu de demandes de retours anticipés ont été formulées malgré le contingent de touristes sur place (3000).


Un discours qui tranche avec celui du SNAV et du Syndicat des tour-opérateurs (Seto) qui ont recommandé aux professionnels du tourisme de permettre les reports sans frais pour les clients en partance pour la Tunisie qui ne souhaiteraient plus y aller, ou simplement reporter leur voyage. Ils ont jusqu’au 10 juillet pour le faire. Le SNAV a ajouté qu’il avait enregistré une chute de 60% des réservations pour la Tunisie suite à l’attentat.


A l’étranger les tours opérateurs ont été plus radicaux. TUI Belgique a annoncé quelques heures après l’attentat l’annulation de tous ses séjours en Tunisie. Les vols vers la Tunisie ont été annulés et le voyagiste s’est engagé à ramener tous les touristes à ses frais.


Colonie la plus touchée par le massacre, la Grande-Bretagne n’a pas fait les choses à moitié. Le tour opérateur Thomson a envoyé dix avions pour rapatrier les 2500 touristes sur place. Il a également annulé tous les voyages vers la Tunisie cette semaine.


Pour rassurer les touristes, la Tunisie a lancé une campagne intitulée  #TUNISIEMOIJYVAIS, rebaptisée TUNISIEMOIJ’YCOURS depuis dimanche 28 juin. Plusieurs personnalités (Bertrand Delanöé, Smaïn, Michel Boujenah…) ont pris la pose pour inciter les touristes à ne pas céder à la peur. Une initiative qui fait suite à celle lancée après les attentats du Bardo. Suffisant pour éviter une saison blanche et sèche ? Rien n’est moins sûr.


 


Jonathan Ardines

Jonathan Ardines