Procès BDS Mulhouse : décision inquiétante de la Cour de cassation

 Procès BDS Mulhouse : décision inquiétante de la Cour de cassation

Mulhouse. Manifestation en solidarité avec les douze prévenus devant le tribunal. Un spectacle de danse et de chants sur le thème du boycott a été offert gratuitement aux clients du magasin Carrefour le 29-11-2010.


 


L’information est passée quasiment inaperçue. Il a fallu attendre quelques jours pour voir l'indignation gagner les réseaux militants.Et pourtant, elle est lourde de conséquences. Il y a quelques jours, la Cour de cassation a confirmé le jugement de la Cour d’appel de Colmar qui condamnait 12 militants du collectif BDS Mulhouse. Une décision qui pourrait faire jurisprudence et rendre de fait le boycott de l'Etat Israël "illégal". 


 


 


Poursuivis en correctionnelle pour « incitation à la discrimination et à la haine raciale », pour avoir appelé au boycott des produits israéliens dans des magasins Carrefour à Mulhouse en septembre 2009 et en mai 2010, ils avaient été relaxés en première instance en novembre 2011. Avant  d’être condamnés deux ans plus tard, en novembre 2013 par la Cour d’appel de Colmar à une peine de 1000 € d’amende avec sursis, en plus du versement de dommages-intérêts et de frais d’avocat aux parties civiles (le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme, Alliance France-Israël, Avocats sans frontière, la LICRA…). Soit, un montant total de 32 000 euros


"C’est une décision inquiétante pour la liberté d’expression", écrit dans un communiqué le bureau national de l'Association France Palestine (L'AFPS), l'un des plus gros groupes de soutiens à la cause palestinienne en France.


"Il deviendrait donc impossible en France de mettre en cause la politique de l’Etat d’Israël ? La France, le pays des Droits de l’homme, serait donc l’exception européenne, le seul pays où les militants du Droit international seraient poursuivis devant les tribunaux ?", interroge encore le bureau national de L'AFPS. 



Du côté du collectif BDS Mulhouse, on s’insurge contre la décision de la Cour de cassation, en rappelant que « ces militants, qui participaient en 2009 et 2010 à une campagne internationale "Boycott, Désinvestissement, Sanction", dénonçaient, par leur action, l’occupation de la Palestine par Israël, le vol des terres et la colonisation en Cisjordanie, le blocus, les guerres menées contre la population civile de Gaza et la violation de tous les droits fondamentaux du peuple palestinien ».


Pour autant, la décision de la Cour de cassation, n’entache en rien la détermination du collectif à « continuer inlassablement, leur combat solidaire pour la paix, la justice et le droit à l’autodétermination du peuple de Palestine. »


 


Du côté pro-israélien, on jubile. "Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes : le boycott des produits israéliens est illégal !" s’enthousiasme l’avocat Pascal Markowicz, membre du comité directeur du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France). Pour lui, "la juridiction suprême de notre ordre judiciaire confirme donc que la liberté d’expression peut être soumise à des restrictions ou sanctions qui sont des mesures nécessaires dans une société démocratique, pour la défense de l’ordre et la protection des droits d’autrui". 



Il faut aller outre-Atlantique pour entendre des voix s'élever contre la décision de la Cour de cassation. "Où sont les néo-défenseurs de la liberté d’expression qui proclamaient après l’attentat de Charlie Hebdo que la défense de cette liberté était si vitale pour tout ce qui est juste et bon dans le monde occidental ? Pourquoi est-ce que le hashtag  #JeSuisBDS ne fait pas le buzz pour défendre ces activistes qui ont été persécutés et poursuivis en France pour leurs opinions politiques ?", s'interroge le journaliste américain, Glen Greenwald dans une tribune, notre confrère à qui l'on doit les révélations sur la surveillance massive de la NSA via les documents fuités par Edward Snowden.


 


Nadir Dendoune


 

Nadir Dendoune