Cinéma. « Cigare au miel » : la vie et rien d’autre

 Cinéma. « Cigare au miel » : la vie et rien d’autre

L’acteur franco-algérien Lyes Salem (G), la réalisatrice française Kamir Aïnouz (2L), les actrices française Zoe Adjani (2D) et Amira Casar (D) posent lors d’un photocall pour le film « Cigare Au Miel » au 14e festival du film francophone d’Angoulême, le 26 août 2021. YOHAN BONNET / AFP

« Cigare au miel », le premier film de la réalisatrice Kamir Aïnouz, se penche sur le parcours d’une adolescente au seuil de l’âge adulte dans la France des années 1990.

 

Selma vit à Neuilly-sur-Seine avec ses parents issus des milieux de la bourgeoisie algérienne. A 17 ans, encore à l’aube de la découverte de son corps, elle va plonger dans les affres de l’adolescence et découvrir la prégnance machiste de la société. Le récit se situe en 1993 au moment où l’Algérie sombre de plus en plus dans la guerre civile. Ces deux mouvements qui entremêlent intimité et marche du monde vont forger les premières années de la vie d’adulte de Selma…

On devine bien entendu une part autobiographique dans cette histoire. Ou du moins une inspiration qui descend en droit fil du parcours de la réalisatrice. Kamir Aïnouz (demi-sœur du réalisateur brésilien Karim Aïnouz), comme Selma, a d’abord fait une école de commerce puis a commencé par travailler dans la finance. Elle a également été une jeune femme algérienne vivant en France au moment de la décennie noire et enfin, elle a été confrontée, dit-elle dans des interviews, aux mêmes difficultés pour s’épanouir.

En cela, le film serait un peu le versant français du “Papicha” de Mounia Meddour. Il s’en démarque toutefois par les rapports que Selma noue avec ses parents, très présents dans ce film. Son père, qui semble proche d’elle et donne des apparences d’homme moderne, se crispe très vite dès qu’il s’agit de donner plus de liberté à sa fille. Sa mère, résignée mais quelque peu indocile n’est pas forcément toujours plus claire avec elle. Aux côtés du noyau familial, il y a celui de l’école que fréquente Selma.

Un repaire de requins au sexisme prononcé dans lequel Selma doit malgré tout apprendre à s’y conformer pour tenter de trouver sa place. Sa relation avec Julien, l’étudiant qui la séduit au premier abord, est ainsi d’une crédibilité sans faille. Ce dernier, lui-même confronté à son devenir de mâle alpha, oscille entre romantisme et utilitarisme, poussant Selma à se redéfinir sans cesse. Marqué par quelques scènes fortes, le cheminement de Selma ne s’en trouve pas de tout repos mais c’est lors d’un voyage en Algérie dans le village kabyle de sa famille maternelle, qu’elle semble enfin commencer à se trouver.

Le personnage, et le film avec lui, semble alors s’être ressourcé pour s’apaiser dans ses dernières séquences et aller vers un final plus lumineux où l’espoir, celui de la jeunesse, prend toute sa place. Le trajet est assez beau, fonctionne beaucoup à l’empathie et surtout est incarné à merveille par une touchante Zoé Adjani, présente sur tous les plans. Avec ce rôle ambitieux, la nièce de la célèbre actrice s’impose d’emblée comme une actrice avec qui il faudra compter.

 

« Cigare au miel », un film franco-algérien de Kamir Aïnouz. Avec Zoé Adjani, Amira Casar et Lyes Salem. Sortie en France : 06/10/2021 – Durée : 1 h 36.

 

Abdessamed Sahali