Quand la réalité rattrape les deux journalistes Medhi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah

 Quand la réalité rattrape les deux journalistes Medhi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah

Medhi Meklat (D) et Badroudine Saïd Abdallah


 


En ce moment, tout est beau pour Medhi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah. Ils ont 23 ans et la vie devant eux. Tout ce qu’ils entreprennent fonctionne. Ces deux journalistes de 23 ans, à l’immense talent, repéré il y a quelques années au Bondy Blog, viennent de sortir un livre « Burn Out » qui cartonne et leur premier documentaire (Quand il fallut partir) qui sera diffusé mi-octobre sur Arte, risque de faire très mal, vu la qualité de ce dernier. Mais … ils sont basanés. 


 


Et si on est pas Zidane ou Yannick Noah, on est logé à la même enseigne que tous les autres. Ce lundi 5 octobre, la réalité les a donc rattrapés. « Ça arrive tous les jours ce genre de choses. Mais aujourd’hui, ça nous est arrivé à nous. Ce n’est pourtant pas la première fois et on arrive jamais à s’habituer à ça », témoignent Medhi et Badroudine sur le site de Clique TV. Les deux se baladaient tranquillement sur les Champs-Elysées, après avoir vu un film. Sans rien voir arriver, six policiers les entourent. Ils sont plutôt bien sapés, à la mode, mais l’un d’eux porte une casquette. Suspecte la casquette pour les forces de l’ordre.


Medhi et Badroudine ne sont pas du genre à courber l’échine et surtout ils sont bien « renseignés ». Ils demandent donc, à juste titre, une « réquisition qui justifie ce contrôle ». En l’absence de ce dernier, les policiers proposent une visite au commissariat pensant que les deux journalistes vont flipper leur race ! « On est d’accord. On veut bien aller au commissariat pour lire la réquisition », répondent Medhi et Badroudine.


Les policiers passent à autre chose. « Ils fouillent nos sacs. Dans l’un d’eux, il y a six exemplaires du roman qu’on a écrit et qu’on a donné un peu plus tôt dans la journée. « Ça, c’est notre livre ». Ils répondent pas. Allument nos téléphones. Ouvrent nos portefeuilles. On insiste. On réclame une raison. « Tu parles trop ». On leur dit que ce contrôle est injustifié. L’un de nous deux est plaqué contre la vitrine Tiffany’s. Les passants regardent ». Medhi et Badroudine ne lâchent rien.


La suite se passe de commentaires. « Ça s’appelle un contrôle au faciès, messieurs », on dit. Et un des policiers, yeux dans les yeux, répond : « Ce n’est quand même pas de notre faute si vous faites plus de conneries que les nôtres ». Donc il y a eux et nous ? Et par cette phrase, de qui parle-t-il vraiment ? Qui sont « les nôtres » ? Et qui sont « les siens » ? On réagit, on lui demande « qui sont les vôtres ? ». Il répond juste : « C’est parce que vous êtes arabe et noir qu’on a pas le droit de vous arrêter ? ».


Ils nous séparent l’un de l’autre. L’un commence à dire que « les méthodes sont honteuses ». Il est coupé par un « Ta gueule ». Et puis un deuxième policier reprend, en tendant sa joue : « Tape-moi, vas-y si t’es un homme ». Réponse calme : « Je n’ai jamais tapé personne, c’est pas vous que je vais taper maintenant ». Il rigole : « Ça se voit que t’as jamais tapé personne, toi ». Il prend le poignet et serre très fort : « Essaye de fuir le contrôle maintenant, vas-y ». Il veut que ça dérape. « On s’est pas trompé, les gars » clame l’un des six policiers. Ils rigolent ensemble. Évidemment, ils ne trouvent rien. Ils piaffent dans nos dos quand ils nous relâchent. On leur promet qu’il y aura une suite. », conclut Medhi et Badroudine.


 


Nadir Dendoune

Nadir Dendoune