La galerie Abla Ababou fait place à la jeune scène marocaine

 La galerie Abla Ababou fait place à la jeune scène marocaine

Yasmine Hadni – NEITHER HAPPY NOR SAD, 150×190 cm, technique mixte sur toile, 2018.

Le peintre, sculpteur et écrivain Mahi Binebine a eu carte blanche pour montrer une dizaine de talents émergents à la galerie Abla Ababou à Rabat. Une exposition qui fait la part belle à l’humain et explore sa sombre condition. Voici nos six plasticiens coup de cœur à suivre.

 

Dès que l’on pénètre dans ce lumineux espace où Abla Ababou a emménagé sa galerie il y a six ans, c’est le travail de Mounia Dadi qui attire le regard. Ses tableaux de grande taille figurant des formes humaines qui s’imbriquent les unes aux autres font forcément penser à ceux de Mahi Binebine.

Les silhouettes peintes dans les nuances de gris par cette plasticienne originaire de Marrakech qui se dit partagée entre « spleen et idéal de vie » semblent interroger la condition humaine et son « insatiable dualité ».

Droite : Mounia Dadi – HISTOIRES GRIMPANTES « FAMILY TREE », 220×155 cm, sculpture, acrylique et mediums sur bois, 2021 – G : Hamouda Mouzouna – Sans titre, 43×30 cm, mixte sur papier, 2018

Même exploration introspective chez Ilias El Haddaoui dont les toiles sont peuplées de jeunes hommes perdus dans leurs pensées.

Des personnages encore dans les œuvres de Hamouda Mouzouna qui dessine sur papier au fusain ou au crayon des portraits où les yeux sont souvent clos comme plongés dans un sommeil éternel. Premier prix du concours Port de Tanger Med, ce lauréat de l’Institut des Beaux-Arts de Tétouan, se dit hanté par le thème de la mort et de la disparition.

Ce n’est pas non plus la joie de vivre qui se dégage des femmes que peint Meriem Ait Tagadirt mais la souffrance de celles qui subissent « brimades injustices, harcèlement dans des sociétés sexistes et rétrogrades et souffrent d’un manque d’accès à l’éducation qui leur permettrait d’atteindre autonomie et liberté de penser ».

La galerie Abla Ababou fait place à la jeune scène marocaine
Droite : Ilias El Haddaoui – SANS TITRE, 100×100 cm, peinture à l’huile sur toile, 2020. G : Meriem Ait Tagadirt – SANS TITRE, 50×35 cm, technique mixte sur papier, 2022.

Sombre carte blanche

Pour une note un peu plus gaie, il faut regarder du côté de Yasmine Hadni. Sur ses toiles nostalgiques s’étalent des souvenirs colorés d’une enfance où la joie côtoie le drame.

C’est aussi dans ses premières années et ses racines paysannes que puise Noureddine Ouarhim. Ses tableaux sont réalisés à partir de ses matériaux de prédilection : terre, écorces et graines d’orge. Sa façon à lui d’interroger ses origines et peut-être aussi de se souvenir que nous sommes poussière et que nous redeviendrons poussière.

La galerie Abla Ababou fait place à la jeune scène marocaine
Droite : Noureddine Ouarhim – SANS TITRE, 150×150 cm, technique mixte sur toile, 2022. G : Yasmine Hadni – NEITHER HAPPY NOR SAD, 150×190 cm, technique mixte sur toile, 2018.

Cette carte blanche aurait pu s’intituler « ombre et poussière » tant l’humeur générale semble bien sombre. Probablement parce que la plupart des œuvres présentées ont été produites pendant la crise sanitaire.

Incapable de se départir de son humour et rire légendaires, Mahi Binebine, dont deux toiles figurent à cet accrochage, confie être « ému de présenter les artistes qui vont nous enterrer » tout en rappelant qu’il s’agit « d’une jeunesse inquiète mais militante qui n’hésite pas à prendre des risques ».

La galerie Abla Ababou fait place à la jeune scène marocaine
Mahi Binebine – SANS TITRE, 170×170 cm, technique mixte sur bois, 2021

Abla Ababou Galerie, à Rabat – www.ablaababou.com

Exposition « Carte blanche à Mahi Binebine », jusqu’au 18 avril 2022

 

>> Lire aussi : Silsila, le voyage des regards, une exposition organisée par l’Institut des Cultures d’Islam

Fadwa Miadi