UE : externaliser l’asile pour se décharger de ses responsabilités

Migrants nigérians en attente d’expulsion à Tripoli, le 30 juillet 2024. Les autorités libyennes ont organisé leur retour, en coordination avec le Bureau de lutte contre l’immigration irrégulière. (Photo : Mahmud Turkia / AFP)
L’Union européenne se dirige vers une modification des critères des pays tiers, afin de multiplier les partenariats pour mieux externaliser la procédure d’asile. Une mauvaise nouvelle pour les droits de l’homme.
En mars 2025, proposition de révision des règles d’expulsion de l’Union européenne. En avril, révision de la liste des « pays d’origine sûrs » ; en mai, révision de la définition de « pays tiers sûrs ».
De nombreuses associations et ONG, dont l’International Rescue Committee ou encore Amnesty International, militant pour le respect des droits fondamentaux des demandeurs d’asile, alertent sur ces nouvelles propositions de l’UE concernant l’asile et la migration.
Les associations dénoncent une volonté de « transférer la responsabilité de la protection des réfugiés vers des pays situés en dehors de ses frontières » et de « contourner les obligations légales découlant de la Convention sur les réfugiés et de la législation européenne ». Et ce, au détriment des droits fondamentaux des demandeurs d’asile.
Pays d’origine pas si sûrs
Les défenseurs des droits des demandeurs d’asile pointent un paradoxe. Dans la liste des « pays d’origine sûrs » établie par l’UE, seuls 20 % des demandeurs, parfois moins, se voient accorder l’asile. Cette liste inclut notamment l’Égypte, la Tunisie, le Bangladesh ou encore le Maroc. Or, dans ces pays, le risque de violations des droits de l’homme est réel.
« Les autorités tunisiennes ont intensifié la répression de l’opposition politique en 2024 en procédant à des arrestations massives, en emprisonnant des journalistes (…) En Égypte, de nombreux opposants pacifiques et membres de minorités religieuses sont victimes de harcèlement », relèvent notamment les associations.
Pourtant, l’inscription de ces nations sur la liste des pays « sûrs » permet aux États membres de l’UE de procéder à un traitement accéléré des demandes d’asile, en partant du principe que leurs requêtes sont a priori infondées.
Centres de retour
Dans le cadre du pacte sur les migrations et l’asile, qui entre en vigueur en 2026, la Commission européenne propose de supprimer l’exigence actuelle d’un lien personnel entre le demandeur d’asile et le pays tiers où il aurait dû, selon elle, demander une protection.
Ainsi, un demandeur pourrait être renvoyé dans un pays qu’il n’a fait que traverser et avec lequel il n’a aucun lien. Par ailleurs, un cadre juridique permettrait l’établissement de centres de retour dans ces pays tiers, à l’image de ce qui existe avec la Turquie, la Libye ou la Tunisie.
Ces centres font craindre aux ONG des violations des droits de l’homme, des détentions arbitraires et des refoulements directs ou indirects.
Le Conseil et le Parlement européen devront désormais se prononcer sur ces propositions avant leur éventuelle adoption.