Environ 70 mille interceptions de migrants en provenance de Tunisie en 2023

 Environ 70 mille interceptions de migrants en provenance de Tunisie en 2023

Il s’agit d’un record : plus du double par rapport à l’année dernière. Ce sont en effet quelques 70.000 migrants qui ont été interceptés cette année 2023 non encore achevée, alors qu’ils tentaient de traverser au péril de leur vie la Méditerranée depuis la Tunisie essentiellement vers l’Italie.

C’est ce qu’a indiqué devant les médias nationaux un porte-parole de la garde nationale tunisienne, Houcem Eddine Jebabli, en se prévalant de cette performance régulièrement documentée ces derniers mois par les passeurs et les migrants interceptés eux-mêmes. Ainsi ces derniers filment et publient souvent ces scènes en mer qu’ils qualifient de « tentative de les noyer » ou de détruire à dessein leurs embarcations en s’attaquant aux moteurs lorsqu’ils refusent d’obtempérer.

Mais ces efforts sécuritaires côté tunisien ne semblent guère impressionner l’actuel pouvoir italien ni la presse italienne obsédée par cette thématique et qui dénonçait encore récemment « un mémorandum d’accord entre les deux pays sans réalité tangible ». Fin novembre, on pouvait y lire un article consacré d’ailleurs à un épisode relativement passé sous silence par les autorités tunisiennes d’une rébellion de migrants subsahariens qui s’en sont pris à des véhicules de la Garde nationale tunisienne.

>> Lire aussi : Tunisie. Migration : le président Saïed rejette la proposition de l’UE

La Tunisie reste avec la Libye le principal point de départ pour des milliers de migrants qui cherchent à se rendre en Europe. Sur onze mois, le nombre de candidats à l’émigration clandestine interceptés par les autorités tunisiennes s’est établi à 69.963 personnes contre 31.297 sur la même période de 2022, selon des graphiques transmis par le porte-parole de la garde nationale.

 

Une répression plus ferme aux abords des côtes

La même source précise que sur ce total, 77,5 % (54.224) étaient des étrangers, en majorité des ressortissants d’Afrique subsaharienne, et le reste est constitué de Tunisiens (15.739), contre 59 % de migrants étrangers en 2022 (18.363) face à 12.961 Tunisiens.

Comment expliquer cette explosion des départs de subsahariens ? Les départs de cette catégorie de migrants a en réalité connu une forte accélération à la suite d’un discours fin février 2023 du président tunisien Kais Saied, dénonçant l’arrivée « de hordes de migrants clandestins » en provenance d’Afrique subsaharienne, et imputant leur présence à un « plan criminel » visant à « changer la composition démographique » de son pays.

Des propos qui ont aussitôt déclenché une violente campagne anti migrants incitant plusieurs pays africains (Côte d’Ivoire et Guinée notamment) à rapatrier des milliers d’entre eux, tandis que beaucoup d’autres ont pris la mer au prix de nombreux naufrages. En 2023, l’essentiel des migrants (82 %) ont été interceptés sur le littoral proche de Sfax (centre-est), ville distante d’à peine 150 km de l’île italienne de Lampedusa, à comparer à un chiffre de 66 % pour 2022, selon la garde nationale.

Quelques semaines plus tard, une nouvelle accélération des départs de migrants d’Afrique subsaharienne s’est produite l’été dernier après que des centaines d’entre eux ont été chassés de Sfax, théâtre d’une rixe ayant entraîné la mort d’un Tunisien, et conduits par la police dans des zones désertiques aux frontières avec la Libye et l’Algérie dans ce que l’ONU a dénoncé comme des « expulsions ». Des accusations rejetées par le pouvoir tunisien.

Seif Soudani