Maroc/Afrique. Un continent au cœur de la stratégie royale – Interview de Roger Sahyoun, Président-fondateur de SOMAGEC

 Maroc/Afrique. Un continent au cœur de la stratégie royale – Interview de Roger Sahyoun, Président-fondateur de SOMAGEC

Roger Sahyoun, Président-fondateur de SOMAGEC. Photo : DR

Dans le discours de la Marche Verte, le roi Mohammed VI a annoncé la volonté du royaume de faire de la façade atlantique du Sahara marocain un pôle d’intégration économique entre l’Afrique et l’Europe. Pour assurer une connexion fluide entre les différentes composantes du littoral atlantique, le souverain a rappelé la volonté du Maroc de mettre à disposition les moyens de transport et les stations logistiques nécessaires. Ce qui inclut avant tout une stratégie de relance portuaire, pour nourrir l’ambition de se donner une place de choix dans le commerce international en tant que hub de l’Afrique et de contribuer au développement industriel et économique du pays.

Si plus que jamais, les ports doivent être des acteurs économiques à part entière, les complexes portuaires marocains ont désormais vocation à accueillir les activités essentielles à la croissance, de contribuer au développement industriel, notamment dans le secteur énergétique ou relevant des filières industrielles d’avenir. Pour accompagner cette stratégie de relance portuaire, les pouvoirs publics s’appuient désormais sur l’expertise reconnue d’entreprises 100% marocaines.

C’est le cas de la SOMAGEC dont Roger Sahyoun, le président fondateur de cet acteur clé de la construction portuaire (dont celui de Port Med) revient sur la valeur ajoutée que cette entreprise impliquée également en Afrique où elle est solidement implantée dans plusieurs pays dont le Sénégal et la Guinée équatoriale, apporte à la stratégie portuaire du royaume.

– Dans son dernier discours, Sa Majesté le roi a rappelé la détermination du Maroc à entreprendre une mise à niveau nationale du littoral, faisant de la façade atlantique du Sahara marocain un espace géopolitique privilégié. Or le grand port de Dakhla Atlantique est une initiative concrète en matière de développement économique et social de la zone littorale atlantique. Comme vous êtes en charge avec d’autres partenaires de construire cet ouvrage titanesque, où en êtes-vous dans l’avancement des travaux ? 

Vous savez, avant de rentrer dans le vif du sujet, je voudrais ici rappeler une vérité qui explique bien des choses : quand un projet, une initiative, une stratégie est portée par le souverain, tout le monde, opérateurs privés, hommes d’affaires, banquiers, pouvoirs publics, main dans la main mènent les travaux à une cadence qui dépasse toujours les délais impartis, tant l’enthousiasme est là et la volonté de bien faire sont palpables.

Les travaux d’exécution du nouveau port Dakhla Atlantique ont été lancés récemment à Dakhla par le groupement marocain SGTM-SOMAGEC Sud pour un investissement total de 12,5 milliards de dirhams. Ce mégaprojet promet d’être une zone industrielle de premier plan pour développer une industrie navale et ériger la région en un hub incontournable et une porte d’entrée vers le continent africain.
C’est aussi le cas de ce mégaprojet de construction du nouveau port Dakhla Atlantique qui avait fait l’objet d’une convention spécifique signée devant SM le Roi Mohammed VI, en février 2016.

Cette infrastructure portuaire qui n’a rien à envier aux grands complexes portuaires dans le monde a tout pour soutenir le développement économique, social et industriel et ce, dans tous les secteurs productifs.

Comme nous travaillons selon les dernières techniques modernes, la construction de ce port se déroule selon une conception évolutive et extensible, comme il est inscrit dans sa construction, la réalisation d’un port en eaux profondes sur la façade atlantique de la région de Dakhla-Oued Eddahab, avec trois orientations majeures, à savoir un port de commerce à une profondeur de -16 m/zéro hydrographique, un port dédié à la pêche côtière et hauturière, et un port dédié à l’industrie navale. Sans oublier les diverses sollicitations de nombreux investisseurs qui veulent placer leurs capitaux dans la production d’hydrogène et dans les nouvelles industries de pointe.

Tanger Med
Tanger Med, premier port d’Afrique. Photo: DR

Il semble que le royaume veut faire des régions sahariennes marocaines un pôle d’intégration économique, un foyer de rayonnement continental et international, est-ce que les projections permettent d’envisager un méga-port qui puisse servir aussi bien les travaux de prospection offshore, la pêche maritime, le trafic maritime, l’économie bleue, tourisme balnéaire et saharien, entre autres ? 

Sous la conduite éclairée de Sa majesté le roi, la fiabilité du modèle économique marocain permettant de soutenir cette vocation afro-atlantique est aujourd’hui une réalité que les grands projets structurants comme le port de Dakhla ou encore le gazoduc Maroc-Nigéria pour ne citer que ces deux exemples phares de la coopération sud-sud, permettront à coup sûr une ouverture et un « accès complet sur l’Afrique avec une fenêtre sur l’espace américain ».

Doté d’une zone industrialo-logistique, d’une zone d’échange commerciale et d’une autre dédiée à la valorisation des activités de la pêche maritime, le port atlantique est appelé à devenir un véritable axe économique autonome, capable de repositionner toute la région sur les routes maritimes.

Ce nouveau complexe portuaire va contribuer assurément à mettre en exergue non seulement la région de Dakhla-Oued Eddahab en tant que porte d’entrée vers les pays du continent africain mais également une zone attractive pour les investisseurs locaux et étrangers intéressés par l’exportation vers l’Afrique, en particulier dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF).

D’ores et déjà, on peut constater que le port mettra à la disposition des opérateurs des 2000 ML de quais à –12 m hydro pour l’activité de la pêche hauturière et côtière, 800 ml de quai à – 8m hydro pour l’activité de cabotage et de commerce; 200 ml de quai à -16 hydro, équipé d’un pipeline pour les hydrocarbures; 400 ml de quai en appontements flottants, sans oublier la rampe pour les navires RoRo (des navires dotés d’une rampe d’accès mobile permettant un chargement/déchargement de la marchandise par tractage entre le bord et le quai).

Situé à 40 km au nord de la ville de Dakhla, ce port sera adossé à une zone industrialo-logistique de 1.650 hectares destinée à offrir des services industriels et logistiques de qualité.

La construction de ce projet titanesque a pris un délai de quelque quatre années à partir de 2003, permettant une mise en service progressive dès 2007. Photo : DR

Si on l’ajoute à la façade méditerranéenne couverte par Tanger Med, avec un solide arrimage à l’Europe, est-ce que le nouveau port de Dakhla va compléter la vocation maritime du royaume de devenir un acteur incontournable dans les échanges économiques et humains avec le vieux continent ? 

Ce port a pour ambition de devenir la plaque tournante des échanges avec l’Afrique comme il a pour objectif d’accompagner la croissance du trafic commercial qui ne manquera pas de saisir l’occasion de profiter d’un ouvrage aussi performant et parfaitement adapté aux nouveaux navires modernes ayant un tirant d’eau plus important.

Par conséquent, au terme de ce chantier gigantesque, d’une emprise totale de plusieurs centaines d’hectares, la nouvelle structure répondra ainsi à la volonté royale soucieuse de favoriser l’insertion des provinces du sud en particulier et du royaume en général dans le concert des nations développées et ce, aussi bien au niveau régional qu’à l’international.

La construction de ce port effectuée aux normes les plus modernes va ainsi participer à réduire les délais d’attente des navires et le coût d’affrètement des marchandises. Pour des raisons stratégiques, ce site a en plus l’avantage d’être au centre de la gravité des zones économiques africano-européennes.

Pour mener à bien un projet titanesque comme le port de Dakhla, on n’a d’ailleurs pas hésité à adopter les principes de base de l’industrie, à savoir, la recherche, le recours aux bureaux d’études, la mise au point de procédés nouveaux, la préparation en amont du travail, s’appliquer à une gestion efficiente, l’organisation des équipes, le respect des plannings, etc… Ce qui fait dire aux spécialistes que du fait de sa situation géographique, et grâce aux nombreux travaux d’aménagement, ce port est appelé à vite devenir un acteur stratégique dans la volonté de développement international du Maroc.

Propos recueillis par Abdellatif El Azizi

Abdellatif El Azizi