« Nos dirigeants n’ont pas tiré les leçons de la crise précédente », Farid Bennai, syndicaliste à « La Sauvegarde 93 »

 « Nos dirigeants n’ont pas tiré les leçons de la crise précédente », Farid Bennai, syndicaliste à « La Sauvegarde 93 »

Farid Bennai, délégué syndical à Force Ouvrière (FO). Photo : DR

Farid Bennai est délégué syndical à Force Ouvrière (FO) à l’association « La Sauvegarde 93 », une des principales associations de protection de l’enfance de Seine-Saint-Denis. En décembre 2020, ce syndicaliste dénonçait dans nos colonnes « les méthodes managériales arbitraires de sa direction ». Deux ans plus tard, pour lui, rien n’a changé…

LCDL : Il y a un peu plus de deux ans dans ces mêmes colonnes, vous dénonciez des problèmes récurrents de management au sein de « La Sauvegarde 93 ». Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Farid Bennai : Il y a 2 ans, un mouvement des salariés et des syndicats dénonçait des conditions de travail difficiles, des traitements inégalitaires et discriminatoires et un mode de management avec une gouvernance autoritaire et arbitraire. Notre direction foule aux pieds ses obligations légales en matière de santé et de sécurité au travail, dans un contexte de crise générale dans la profession et au-delà. Hélas aujourd’hui, le système est le même. Il reproduit les mêmes impasses sans avoir tiré les leçons de la crise précédente.

Qu’est-ce que les syndicats ont fait pour améliorer les choses ? 

En novembre 2021, suite aux nombreuses alertes sur les conditions de travail dégradées des salariés, les syndicats décident de faire appel à une expertise indépendante, comme l’article L. 2315-94 du code du travail le permet. Cette décision est tout de suite contestée par les dirigeants qui déposent alors un recours devant le tribunal judiciaire de Bobigny.

Le tribunal nous a donné raison et pourtant, l’expertise n’a toujours pas été diligentée et aucune mesure n’a été prise pour améliorer la situation. Rien n’a été fait pour stopper les mauvais traitements, et pour assurer l’obligation de santé et de sécurité vis-à-vis des salariés. Un comble pour une association de protection de l’humain, financée par le département…

Que demandez-vous concrètement aujourd’hui ? 

Nous demandons que tout le système soit changé afin qu’un dialogue social mature puisse s’installer. Il faut des moyens pour assurer la prévention des risques professionnels, notamment contre les risques psychosociaux qui gangrènent certains services.

Nous demandons que les enquêtes imposées par le code du travail suite aux déclenchements de droits d’alerte soient honorées. Il n’est pas admissible que notre employeur fasse fi des lois en vigueur. Il doit pouvoir protéger ses salariés comme il a l’obligation de protéger les usagers dont il a la charge avec l’argent public qu’il perçoit.

Enfin, nous demandons une gouvernance participative et partagée. Cela signifie un changement de la culture du management au profit d’une gouvernance soucieuse de stopper l’hémorragie qui sape les énergies des travailleurs sociaux et des éducateurs qui s’accrochent malgré tout. Beaucoup de collègues souffrent en silence, et ne font pas confiance à leur hiérarchie pour régler ce qui pose problème, par peur de représailles. Ce qui est un non-sens dans une association de protection de l’humain.

Que comptez-vous faire si vous n’êtes pas entendus ?

Beaucoup de nos collègues sont déterminés et comptent faire du bruit pour que chacune et chacun prennent leurs responsabilités. Aujourd’hui, une table ronde avec notre financeur, soit le conseil départemental de Seine-Saint-Denis, s’impose pour faire le point sur les demandes d’enquêtes déclenchées par les élus, y compris celle menée par le département en 2021. Il est urgent d’agir maintenant.

Nadir Dendoune