Soudan : début du mois de ramadan dans un pays ravagé par la guerre

 Soudan : début du mois de ramadan dans un pays ravagé par la guerre

Des déplacés s’entassent dans des campements de fortune à Wadi Halfa dans le nord du Soudan.

À l’ombre médiatique de Gaza, le Soudan démarre un mois de ramadan sous la menace de la famine. Alors que près de la moitié des Soudanais ont du mal à se nourrir, le mois sacré des musulmans est marqué par l’amertume.

Alors que l’attention de la communauté internationale se concentre sur le drame de Gaza, une autre guerre entre dans son douzième mois. Deux généraux s’affrontent au Soudan depuis le 15 avril 2023. La guerre civile qui y a éclaté lors du précédent ramanda a fait des milliers de morts et déplacé 8 millions de personnes. Soit la plus grande crise humanitaire dans le monde actuellement selon l’ONU.

Lire aussi >> Fin de l’opération de rapatriement des Marocains du Soudan

Violences, bombardements, pillages, inflation. Le cocktail explosif qui a frappé le pays a mis son économie à genoux. À Khartoum, capitale qui comptait 5 millions d’habitants, la désolation a remplacé l’activité foisonnante habituelle en cette période de l’année.

« On mange un repas par jour depuis des mois et on n’a même plus de quoi le préparer nous-mêmes, on nous le sert dans une soupe populaire organisée dans une mosquée », témoigne Othmane Idriss, habitant de Khartoum, à l’AFP. Avant le conflit, il tenait un petit magasin d’alimentation, mais aujourd’hui, son quartier est méconnaissable, réduit à néant par les combats.

 

Plus d’un Soudanais sur trois en insécurité alimentaire aiguë

La situation est tout aussi dramatique ailleurs. Mohammed Soleimane, qui tente de maintenir son commerce ouvert dans la ville d’al-Rahed, au Kordofan-Nord, se heurte à de nombreux obstacles. Les taxes imposées par les rebelles des Forces de soutien rapide (FSR) rendent les prix prohibitifs et les clients sont de moins en moins nombreux. Pour beaucoup, la famine est une réalité quotidienne, exacerbée par l’effondrement des télécommunications qui prive les plus démunis des transferts qu’ils recevaient de leurs proches à l’étranger sur leurs applications mobiles.

Imed Mohammed, comme la majorité des fonctionnaires du pays, n’a pas reçu de salaire depuis onze mois. Alors que le ramadan débute, la faim est déjà présente. Selon l’ONU, 18 des 48 millions de Soudanais sont en insécurité alimentaire aiguë, et le Programme alimentaire mondial (PAM) craint une crise alimentaire sans précédent.

 

Indifférence de la communauté internationale

La situation est critique dans les camps de déplacés, où la mortalité infantile est alarmante. À Zamzam, dans le Darfour-Nord, un enfant meurt toutes les deux heures selon Médecins sans frontières (MSF). Save the Children estime que près de 230 000 enfants et femmes enceintes sont en danger de mort par famine au Soudan. Une situation rendue encore plus difficile par les limitations imposées aux agences de l’ONU et aux ONG.

La communauté internationale semble désintéressée de cette crise humanitaire majeure. Les appels aux au soutien international restent largement ignorés. Les pays donateurs n’ont jusqu’à présent couvert que 3% des besoins de l’ONU pour l’aide humanitaire au Soudan. Pour de nombreux Soudanais, le ramadan cette année est dénué de toute saveur. Les traditions festives ont cédé la place à la lutte pour la survie, et l’avenir reste incertain dans un pays meurtri par la guerre et la famine.

Rached Cherif