Projet de loi immigration : l’aide médicale d’Etat dans la ligne de mire

 Projet de loi immigration : l’aide médicale d’Etat dans la ligne de mire

Médecins du monde : « Désintox : l’aide médicale d’Etat est souvent accusée à tort de susciter du ‘tourisme médical’ ou ‘un appel d’air’. Il n’en est rien ». Thibaut Durand / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

L’aide médicale d’Etat (AME) est très clairement menacée par le projet de loi immigration. Une suppression qui serait une grave erreur selon Médecins Sans Frontières (MSF).

« Beaucoup [de migrants et réfugiés, ndlr] n’ont pas eu d’accès récent à des soins depuis des mois, voire des années. Supprimer l’aide médicale d’État, seul dispositif qui leur permette d’être soignés en dépit de leur situation administrative, est indigne du point de vue humain et incohérent du point de vue de la santé publique », prévient le Dr. Claudia Lodesani, infectiologue et responsable des programmes migration pour MSF en France et en Libye.

L’organisation s’oppose clairement à la proposition de suppression de l’aide médicale d’Etat contenue dans le projet de loi immigration examiné à partir d’aujourd’hui (6 novembre) au Sénat.

« Appel d’air » migratoire ?

L’AME permet aux personnes étrangères, sans droits à l’assurance maladie et particulièrement vulnérables, d’accéder à des soins. Le 15 mars dernier, Françoise Dumont, sénatrice LR, faisait adopter un amendement au projet de loi immigration visant à supprimer l’AME pour la remplacer par une aide médicale d’urgence (AMU).

Cette nouvelle aide aurait un périmètre d’accès aux soins plus limités. « Nous devons stopper la distribution d’aides incontrôlées, qui créent un « appel d’air » migratoire, que la France ne contrôle plus du tout », expliquait la sénatrice LR sur le réseau X, en mars dernier.

« Argument fallacieux »

MSF indique que, malgré le fait qu’ils soient éligibles à l’AME, 8 patients sur 10 suivis par l’organisation n’ont pas de couverture maladie.

Appel d’air migratoire, tourisme médical, des arguments de sénateurs en faveur de la suppression de l’AME que Euphrasie Kalolwa, responsable plaidoyer pour la mission France de MSF, balaie d’un revers de main :

« Invoquer le tourisme médical pour justifier la suppression de cette aide est un argument fallacieux : dans leur grande majorité ces personnes ne savent même pas qu’elles peuvent en bénéficier ». 

Pourtant en 2019, la dernière étude nationale menée par l’Irdes (Institut de recherche et documentation en économie de la santé) indiquait qu’un immigré en situation irrégulière sur deux bénéficiait de l’AME.

Selon un rapport de l’Assemblée nationale, en 2023, le dispositif coûte 1,2 milliard d’euros pour un peu plus de 400 000 bénéficiaires.

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Charly Célinain