Un livre qui retrace l’invisibilisation des femmes noires au théâtre

 Un livre qui retrace l’invisibilisation des femmes noires au théâtre

« Noires mais blanches, blanches mais noires » de Yasmine Modestine, paru aux éditions L’Harmattan

« Noires mais blanches, blanches mais noires » est un ouvrage signé Yasmine Modestine. L’auteure interroge l’occultation des femmes noires sur les planches.

Oui Cléopâtre était africaine dans les écrits de Shakespeare, et oui Corneille a blanchi son Andromède. C’est en intégrant ces faits que l’on pourra commencer à « reconstituer l’histoire de ces femmes effacées, oubliées de l’histoire » et qu’elles cesseront de hanter les scènes de théâtre, peut-on lire dans le texte de Yasmine Modestine.

Celle-ci ambitionne de rétablir la place des figures féminines noires au théâtre. Pour cela, elle décortique les textes de certains grands auteurs de théâtre. Et met en perspective ces choix qui ont été si préjudiciables et le sont d’ailleurs encore.

En effet, les théâtres français et anglais ont purement et simplement fait disparaître la couleur de la femme noire « au moment de sa représentation quand celle-ci ne correspond pas à l’image d’une femme noire infériorisée ».

La sexualité et la peur du métissage en sont les causes.

Corps clair, âme claire

Cette tendance s’inscrit dans un contexte historique particulier : « au fur et à mesure que l’esclavage s’accroît en Europe, l’image de la femme noire devient négative », écrit l’auteure.

La femme métisse est « plus dangereuse encore », car elle peut « passer pour blanche ». A cette époque, dans toutes les têtes, le noir est la couleur du diable, à l’inverse « un corps clair possède une âme claire ». Corneille ressent donc « le besoin de blanchir » Andromède, sorte de « parti pris » qu’il maintient à plusieurs reprises.

A cette époque de l’histoire, « les mots esclave et noir se superposent », écrit Yasmine Modestine. La pièce de Marivaux « La Dispute » en est une parfaite illustration. Aujourd’hui, les réalités ont évolué mais de lourdes traces subsistent.

L’auteure nous rappelle très justement que la question de la couleur de la vraie Cléopâtre, pas seulement celle de Shakespeare, fait toujours, et tristement, débat.

« Noires mais blanches, blanches mais noires » de Yasmine Modestine, paru aux éditions L’Harmattan

 

Chloé Juhel