Île-Saint-Denis : le collectif qui demande la cantine pour tous va saisir le préfet

 Île-Saint-Denis : le collectif qui demande la cantine pour tous va saisir le préfet

Façade du bâtiment du Groupe scolaire Paul Langevin


 


Le collectif Cantine de L’Île-Saint-Denis (93) promet qu'il ne reculera pas. « Hier soir (NDRL : mardi 15 septembre), nous avons décidé de saisir le préfet, le Défenseur des droits et aussi le directeur des services de l’éducation nationale », explique Mathilde Rembert, l’une des porte-parole du collectif. « Et si la mairie ne recule pas, nous irons devant le tribunal administratif », continue cette mère de deux enfants. Le motif de leur colère ?  


A L’Ile-Saint-Denis, ville dirigée depuis 2001 par l’écologiste (Europe Ecologie Les Verts) Michel Bourgain et comme c’est le cas dans plusieurs dizaines de municipalités françaises, la cantine, le centre de loisirs ainsi que les activités périscolaires sont réservés en priorité aux enfants dont les deux parents travaillent. Une disposition discriminatoire et généralement réservée aux villes de droite qui figure pourtant noir sur blanc dans les règlements intérieurs des établissements et qui date de plusieurs années. Bien avant que la municipalité, longtemps communiste, change d’étiquette. 


Une disposition toujours en vigueur à L’Île-Saint-Denis alors que l’Assemblée nationale a adopté, jeudi 12 mars 2015, une proposition de loi « visant à garantir le droit d’accès à la restauration scolaire ».

Dans son article 1er, elle rappelle que « l’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille. »

« Les repas et les activités éducatives de qualité devraient bénéficier à tous les enfants, quel que soit le statut professionnel de leurs parents, dont ils ne sont pas responsables. Pour certains enfants, le repas pris à la cantine est le seul repas équilibré de la journée, avec des produits bio, de la viande, des fruits… Certains parents n’ont pas les moyens d’offrir à leurs enfants les activités éducatives proposées par le centre de loisirs : sorties au zoo, à l’aquarium, en base de loisirs, au spectacle », rappelle Mathilde Rembert.


Ajoutant que « certains enfants restent devant la télé ou traînent en bas de leur immeuble, ce qui est défavorable à leur réussite scolaire et donc à leur avenir. Un parent, même s’il ne travaille pas a besoin de temps libre sans ses enfants pour chercher du travail, faire des démarches administratives, ou tout simplement faire le ménage ou les courses ».  Des arguments que comprend Marc Eric Dubaile, le directeur en charge de l’éducation à l’Ile-Saint-Denis, mais pour lui,  changer les règlements intérieurs «provoquerait un appel d’air ».


« La ville n’a pas les capacités physiques pour accueillir l’ensemble des écoliers. Nous manquons d’espace. Nous sommes donc obligés de prendre en priorité les enfants dont les parents travaillent. Les autres enfants ont un parent, ou les deux, à la maison », explique Marc Eric Dubaile, précisant «que pour ceux qui ne remplissent pas les conditions, il existe des dérogations ». « A ce jour, nous avons toujours accepté les demandes des parents : nous n’avons jamais laissé un enfant dans la rue », rappelle encore le directeur de l’éducation.


Pour Mathilde, les explications avancées par le directeur de l’éducation ne tiennent pas. « D’après les résultats de l’enquête menée par l’APE (Agence de participation de l'Etat) auprès des parents d’élèves ce printemps, l’ouverture de la cantine pour tous ne provoquerait pas un afflux de demandes ingérable : sur les 40 % de parents dont les enfants ne déjeunent pas à la cantine, seule la moitié souhaiterait que leurs enfants y aient accès, dont seulement 7 % tous les jours ». 



La municipalité, campant sur ses positions, l’affaire se réglera sans doute devant le tribunal administratif. « Nous perdrons sans doute », admet Marc Eric Dubaile. « Si c’est le cas, nous serons donc contraints de n’appliquer aucun filtre à l’inscription: il ne restera alors à la municipalité que deux solutions : Tirer au sort les familles, ou appliquer la politique du premier arrivé, premier servi, explique ce dernier. « Et là, croyez-moi, le système sera encore plus injuste », conclut Marc Eric Dubaille.


 


Nadir Dendoune

Nadir Dendoune